LES TOROS
Un coup couchés, un autre tournés, il n’est jamais très facile de prendre en photo les divers lots de toros qui attendent d’être lidiés pour la Feria Pascale. Bref, on fait ce qu’on peut, et ces quelques clichés sont juste pour vous donner une idée….
Samedi 15 avril, 16h30 : six García Jiménez pour Juan Bautista, Manzanares et Andrés Roca Rey.
Dimanche 16, 16h30 : six Juan Pedro Domecq pour Enrique Ponce, Alejandro Talavante et Thomas Joubert.
Lundi 17 avril, 11h : six Bohórquez pour Joao Moura, Leonardo Hernández et Léa Vicens.
A 16h30 : six Pedraza de Yeltes pour Morenito de Aranda, Iván Fandiño et Román.
LES STANDS
LES SALMANTINITOS
Comme évoqué hier, Jean-Baptiste Jalabert a tenu à présenter dimanche trois jeunes aspirants de la classe biberon de l’école de Salamanque. Tous trois talentueux, avec tout de même la palme à Marco Pérez qui a fait chavirer les présents…
Arles a-t-elle découvert le nouveau génie de la tauromachie ? Le futur de la tauromachie était bien représenté ce matin à Arles puisque le tout jeune torero de Salamanca, Marco Pérez, 8 ans, s’est produit pour la première fois en France sur le sable des arènes Francis Espejo. Une lueur d’espoir et une preuve que la tauromachie a encore de belles années devant elle…
Pour se faire une idée, voir la vidéo en cliquant ICI
Possibilité de venir découvrir les toros de la féria à l’Espace Toros tout au long de la semaine, jusqu’à vendredi 13h.
Vente de billets de la feria au guichet des arènes de lundi à jeudi de 9h30 à 12h30 et de 13h30 à 17h30. A partir de 9h et sans interruption les jours de feria.
0891 700 370 / http://www.arenes-arles.com
NÎMES
La vente des abonnements a ouvert lundi 10 avril.
Elle se poursuivra jusqu’au samedi 29 avril.
Nos bureaux sont ouverts du lundi au vendredi de 9h30 à 18 heures et le samedi de 9h30 à 12h30.
Vous pouvez acheter par VAD en téléphonant au 081 701 401 sur notre site arenesdenimes.com – www.arenesdenimes.com
(Communiqué)
PREGÓN
Tant pis si l’actualité a curieusement repoussé après l’épilogue de cette édition des Rendez-Vous en Terre d’Aficion la publication du « pregón », que l’on va traduire par discours inaugural.
A charge du journaliste et écrivain Michel Cardoze, son intervention au Carré d’Art Jean Bousquet lui a valu une ovation de gala ô combien méritée de la part du nombreux public venu assister à la soirée inaugurale initiée notamment par les Avocats du Diable…
Ci-dessous, la transcription intégrale de son pregón tournant autour du parrain de ces Rendez-Vous en Terre d’Aficion, Palomo Linares, hélas empêché…
“Mesdames, Messieurs, aficionados y otros, cher Palomo Linares,
Commençons par le chiffre 7, puisque nous sommes le 7 avril et que la figura Palomo Linares est une de celles qui ont fait des années 70, dans les Arènes et autour, un âge taurin flamboyant, artiste, et festif si particulier, mêlant l’amour des publics, l’aventure cinématographique et ses baisers de feu, l’amour des femmes, de toutes, et même…« ces belles étrangères qui vont aux corridas et qui se pâment d’aise devant la muleta… »
Mais Jean Ferrat chante aussi, du fond de son respect du peuple :
« Quand le toro s’avance
Ce n’est pas par plaisir
Que le torero danse
C’est que l’Espagne a trop
D’enfants pour les nourrir
Qu’il faut parfois choisir
La faim ou le toro”
Et à Linares en 1947 lorsque vous êtes né, Sebastian Palomo Martinez, enfant d’une famille d’ouvriers, la faim rodait à coup sûr autour des mines de linarite, rare sulfate de plomb et de cuivre bleu, qui faisait danser les cours de Bourse à Londres.
Mais les mines n’ont pas construit, seules, tant s’en faut, la célébrité de Linares, cette ville andalouse que domine le Défilé de Despeñaperros, par où l’on entre en Andalousie lorsqu’on vient du nord. Les légendes préfèrent évoquer la mort de Manolete, l’année même de votre naissance. D’autres se souviennent que le guitariste Andres Segovia est né à Linares et qu’il a fait entrer la guitare dans la noblesse supposée de la musique dite classique, entre Bach et Fernando Sor. D’autres enfin saluent une autre de vos “payses”, la chanteuse flamenca Carmen Linares.
On est flamenco à Linares, mais on chante aussi la Taranta, variante sombre d’une tarantelle, – mais quelle tarentulle aurait donc piqué ces hommes souterrains ?- car la Taranta est l’hymne grave des mineurs de la linarite, qui maudissent leur solitude, seulement accompagnés qu’ils sont par une chandelle… « y la salida, no la encuentro » (et la sortie, je ne la trouve pas, et la sortie est introuvable) .
Tiens, cela me fait penser qu’on dit parfois : l’art du toreo consiste à toujours laisser une sortie au toro… Le mineur de sulfate de plomb et de cuivre bleu de Linares n’avait la plupart du temps aucune chance de s’en sortir…. « Y la salida, no la encuentro »…
Cher Palomo Linares, vous l’avez vite cherchée et trouvée, la sortie, par le haut, par le travail obstiné, le courage, l’amour du public. Vous n’êtes pas seulement l’un des rares à avoir coupé un rabo – la queue – à Madrid, en 72.
Car sur le sable des ruedos vous avez vite construit une signature originale, votre « marque de fabrique » : vous avez suggéré au public que c’est lui, sur les gradins, là-haut, sol y sombra, barrera o tendido, c’est lui qui torée… comme un danseur, un athlète, un comédien parvenu aux sommets de la performance si facilement que son travail répété et harassant est invisible…
Cela lui paraissait si facile, si fluide, si élégant, votre présence entre les cornes et sur les flancs du fauve, alors, c’est lui, le public, qui maniait le drap, jouait du poignet et allongeait la jambe, redressant le buste.
Le public de la fin des années 60 (votre alternative est millésimée 66, confirmée 67) et celui des années 70, avait envie de la Fiesta au sens propre du terme, mais une Fiesta à laquelle nous pouvions donner du sens. Vous l’avez senti, sans aucun doute, avec votre complice fraternel El Cordobés, lorsqu’après l’an 68, qui secoua l’Europe à coup de jeunesse révoltée, en 1969 donc, vous avez repoussé la main de fer des impresarios en assumant seuls, sans eux, 65 mano a mano, au point qu’on vous appela tous les deux : « los guerrilleros »… En Espagne, on n’use pas du mot guerrillero par hasard. Les mots portent des sens symboliques.
L’époque, celle de ces années fin 60 et 70, a vu avec de grands sourires le monde craquer aux coutures de ses vieux habits. Même si les choses avaient mal commencé en 73 avec le golpe assassin de Santiago du Chili, nous avons en avril 74 tellement aimé les œillets des capitaines portugais rentrés d’Angola.
Pour une fois que des tanks et des uniformes rétablissaient la liberté et vidaient les prisons !
Chacun ses gradés ! Car l’été de la même année 74 des colonels furent chassés du pouvoir en Grèce, la démocratie rentrant chez elle, à Athènes et dans les îles où le poète Yannis Ritsos, le musicien Theodorakis, et des combattants par milliers, ne désespéraient pas.
Et en 77, Prague tenue en laisse depuis 68 et son Printemps à visage humain, Prague signait massivement la charte d’un dramaturge, Vaclav Havel, charte et dramaturge qui seraient plus tard le ferment d’une libération. Puis en 78, tout le monde devina que l’élection d’un pape polonais serait un outil bien usiné, destiné à stimuler la fin d’un système qui décidemment ne réussissait plus à faire rêver, un monde failli qui avait perdu sa « force propulsive », comme disait un aristocrate en Sardaigne, et communiste à Rome, Enrico Berlinguer. Lui aussi, participait à l’optimisme en train d’enchanter l’Europe, main dans la main avec des espagnols revenus des exils, sortis de prison ou de clandestinité à partir de 1975…
1975, le drapeau américain s’était envolé de Saïgon en avril avec le dernier hélicoptère de la guerre, le monde, les campus de Californie ou de la côte Est respiraient avec le premier concert des Sex Pistols.
Mais l’essentiel en Europe cette année là fut l’agonie interminable d’un généralissime médicalisé. Jose Bergamin a recouvert ce long moment d’un souvenir poétique, le récit des dernières heures de son ami Ignacio Sánchez Mejías, avec cette formule saisissante : « la mort paresseuse et lente »…
Cette « mort paresseuse et lente », celle du généralissime médicalisé, fut d’autant plus vite oubliée que la vieille Espagne ne s’était jamais endormie et que dans les universités, les villes, les mines et les prisons même, avaient mûri les fruits qui donnèrent naissance à un formidable mouvement, une « movida », la partie la plus visible et spectaculaire d’une culture libérée, d’une démocratie réinventée, sous l’autorité d’un Roi qui surgit démocrate solide des casernes du passé où il avait été éduqué, croyait-on.
Cette explosion des sens et de la création, du plus « déjanté » au meilleur du cinéma et de la danse ou de la littérature, cette explosion ne fut pas qu’une revanche, mais une manière d’ »assumptio ».
L’Espagne avait pu être meurtrie et salement punie, elle ne s’était jamais assoupie, elle se reprit.
On a craint alors pour la Fiesta Nacional que la courte vue aurait pu assimiler au passé révolu.
C’était sans compter avec les artistes de verdad, le sang neuf venu de l’Amérique indienne et latine, où vous même, Palomo Linares, étiez dans votre jardin, si je puis dire. C’était sans compter avec la Comtesse de Barcelone, la mère du roi Juan Carlos, dame de fer de l’anti-franquisme, familière des Arènes de Bayonne, comme de nombreuses plazas en Espagne. Et vous, jusqu’au début des années 80, Palomo Linarès, vous avez accompagné la nouvelle Espagne entre les cornes, transmettant l’art du toreo à des générations que nous avons aimé, de Bayonne à Nîmes, de Vic à Béziers ou Dax et Mont de Marsan, ce dernier quart de siècle.
J’ai évoqué José Bergamín. Avec lui on n’en reste pas aux seules citations. C’est un maître du langage, un rêveur du monde, catholique révolté comme notre Bernanos des « Grands cimetières sous la lune », tenté par la fraternité et le partage d’un communisme resté idéal. Un espoir idéal qui s’est peut-être éteint dans les années où vous avez dominé l’escalafón en pratiquant et faisant aimer une tauromachie que Bergamin avait définie comme l’art du Birlibirloque, dans un livre dont le succès fut beau en France dans les années 70 et 80, notamment grâce à Florence Delay et feu Pierre Lartigue et à quelques éditeurs héroïques, en même temps qu’ils traduisaient et éditaient un autre écrivain castillan hors des règles académiques, Ramón Gómez de la Serna, auteur du fameux “Torero Carracho”.
Bergamín et Ramín nous en persuadent, s’il en était besoin : jamais l’art du toreo ne peut être aimé, pratiqué, ou rejeté, ou ignoré, en dehors de son temps, de ses orages et de ses embellies, de ses catastrophes ou de ses bonheurs.
Ramón Gómez de la Serna construit le destin de Carracho, fils d’une concierge et d’un garde civil, sur fond de guerre coloniale.
José Bergamín invente son “Art du Birlibiloque” sans baisser la garde devant les dictatures ici ou là.
Pour José Bergamín, l’art de toréer – “En el toreo todo es verdad y todo es mentira”- ai-je besoin de traduire ?- l’art de toréer est un moyen d’élucider le destin de l’homme à coup de métaphores. « El arte de birlibirloque es el arte de poner y quitar », « l’art de mettre et de retirer »…
Il me semble, cher Palomo Linares, que vous avez pratiqué « el arte del Birlibiloque » car vous avez été de votre temps, fils de la misère devenu un artiste sur deux continents, un géomètre sur le sable, un rebelle lorsqu’il le fallut, un amoureux toujours, une figure du cinéma d’alors, aujourd’hui un peintre, un témoin heureux, du moins je le crois.
J’aime que Bergamín ait eu le culot d’écrire ceci qui va bien à toutes figuras, ici et ailleurs sur l’atlas de la géographie taurine :
« Une corrida est un spectacle immoral, et par conséquent, il éduque l’intelligence » « una corrida de toros es un espectaculo immoral, y por consiguiente, educador de la inteligencia »
ou bien ceci :
« La véritable tauromachie ne se moque pas seulement du toro, elle se moque aussi de la tauromachie »
« El verdadero toreo no se burla solo del toro, se burla del toreo tambien »
ou encore ce dialogue :
« -Tu es un pessimiste ? « – Oui, parce que je ne veux rien d’autre que la joie »
Dès ce soir autour des tables nîmoises, dès demain aux Arènes, ici et ailleurs, chacun pourra pratiquer « el Arte del Birlibirloque » .
Ce rendez-vous annuel permet à toutes et tous de sentir et d’éprouver la passion, l’aficion, c’est à dire l’attachement charnel et langagier, le goût, le désir du toro brave et de la mise en suerte et en gloire de celui qui voit, admire, applaudit ou travaille cape et muleta en main, sur le sable du ruedo.
Rencontres avec les Maestros, rencontres avec la tauromachie au cinéma, vieille aventure amoureuse qui passe par Hollywood aussi, rencontre en atelier avec le sable pour de vrai, la cape et le « toreo de salon », pour mieux aimer dimanche « por la tarde » la novillada non piquée réservée à la jeunesse, peut-être aux figuras de demain.
Mesdames et Messieurs, grâces soient rendues aux inventeurs de ce Rendez-Vous en « Terre d’Aficion », à Nîmes, capitale de la tauromachie en France, où la municipalité assume cette passion et son histoire en organisant l’événement.
Rien de cela sans doute ne serait possible sans le destin d’un homme, figura du toreo à sa façon, en charge des Arènes de Nîmes depuis 35 ans et qui vient de conquérir l’honneur et la tâche de diriger les Arènes de Madrid, je veux nommer Simon, Simon Casas, Simon désormais « El Monumental », que l’on retrouve aussi dans l’aventure singulière du Prix Littéraire Hemingway de la nouvelle tauromachique, fondé par lui et les Avocats du Diable, prix littéraire qui s’est imposé en 13 ans sur la planète taurine et au delà, le jury chaque Pentecôte en sait quelque chose.
C’est donc l’honneur de l’aficion nîmoise, de sa Municipalité, de Simon Casas, des Avocats du Diable, de la constellation profuse des clubs taurins, de permettre dans la joie et la paix cet apprentissage possible du désir brave.
Mesdames et Messieurs, je vous remercie d’aimer le toreo et la littérature.
Ramón Gómez de la Serna et José Bergamín sont en vente libre.
Ainsi que l’Eloge de la Folie, par Erasme, qui se conclue ainsi :
« Applaudissez, et allez boire ! »
Michel Cardoze
Nîmes-7 avril 2017
Organisation :
Ville de Nîmes & Simon Casas Production avec l’appui des Clubs Taurins Nîmois et de l’UCTPR.
Création littéraire : Michel Cardoze a la demande des Avocats du Diable. Commande de la Ville de Nîmes.