José Fuentes : Zapatero, camarero y torero…
Un visage de romantique.
Des yeux de tendresse.
Un nez de distinction.
Une bouche de gourmandise.
Et une coupe de cheveux.
A la George Harrison.
Un homme.
De Linares.
A l’allure d’un Musset.
Qui, comme Palomo, au plomb de la mine de ses paisanos.
Aurait préféré.
Le sable de l’arène.
Je ne l’ai pas souvent vu toréer.
Au plus quatre ou cinq fois.
Une seule aurait suffi.
L’art n’a nul besoin d’être ressassé.
«Lolita, lumière de ma vie, feu de mes reins.»
L’incipit de «Lolita» de Nabokov.
On a compris ce à quoi.
Et celui à qui on a affaire.
Extraction modeste.
Epure aristocratique.
Phrases en verre coupant.
Passes en cristal poli.
Les deux qui interrogent.
Un brin de menthe sur une décharge de Soweto.
Ecriture.
Et toreo.
Un dimanche de San Isidro d’une année bien lointaine.
Lleno hasta la bandera.
En barrera, le Prince Juan Carlos en costume.
Et dans le callejón, «El Pipo», en chapeau blanc.
Dans le ruedo, Ordóñez, Santiago López.
Et l’ancien apprenti cordonnier que fut José Fuentes.
Le capote sans un pli.
Comme l’abandon d’une duchesse en mantille dans les bras d’un journalier.
Comme un toque de guitarra.
De l’« Allegro moderato con gracia » d’Andrés Segovia.
Aucun abus, pas d’outrance.
Quatre lances en notes de justesse de ton et autant d’harmonie.
La muleta qui œuvre comme une forme à monter.
Tendue de fils de chanvre et de lin.
Cousue main droite, brodée main gauche.
Sans glue.
Un remate de cuir.
Et un sourire coquin.
L’estocade en un marteau à clouer.
Droite et meurtrière.
Aucune retouche.
Une faena brindée au Prince.
Mais qui aurait pu l’être à John Lobb.
Chausseur à Regent’s Street depuis 1866.
José Fuentes, un homme de Linares, camarero y zapatero.
José Fuentes, un torero d’échoppes d’ombre et de cortijos de lumière.
Echoppe d’ombre.
De la haine ordinaire d’un Navalón qui lui reprochait son pico de combat.
Echoppe d’ombre.
Du toro de Louro Fernández de Castro qui lui troua le visage à Huesca.
Echoppe d’ombre.
D’un autre à Barcelone qui pendant quatre ans l’empêcha de marcher.
Echoppe d’ombre d’un argent.
Qu’il dispersa amoureusement dans les parfums du catalogue de Leporello et secrètement dans la poudre blanche « pour te délivrer du singe qui te ronge la nuque. »
Et cortijo de lumière.
Pour un novillero culte.
Cortijo de lumière.
Pour la queue du toro de Garcigrande de Barcelone qu’il toréa le chapeau du « Pipo » dans la main droite.
Cortijo de lumière.
Pour le million de pesetas qu’il prêta à Victorino pour acquérir les vaches d’Escudero.
Cortijo de lumière.
Pour les onze oreilles de Madrid et la Grande Porte du 12 octobre 1981.
Un Jean-Baptiste Lully du tentadero.
Un Véronèse du capote, un Noureev de la muleta.
Un torero de soleil.
De pluie et de vent.
Dans les voiles d’Henri de Monfreid.
Et le désespoir de William Burroughs.
José Fuentes.
Matador de toros por la gracia de Dios.
Un torero de cartel qui m’a marqué au fer du toreo.
Avec la nostalgie de ne pas l’avoir suffisamment dit.
Datos
José Fuentes Sánchez.
(Linares, 16 de febrero de 1944 ; Sevilla el 26 de mayo de 2023.)
De aprendiz de zapatero y de camarero con el famoso “Montorito”, el del “Rincón Taurino” de Linares, pasó al mundo del toreo. El trabajo en un ambiente modesto, las clases en las Escuelas Profesionales de la Sagrada Familia y las capeas en el campo, forjaron al hombre y al torero.
Cuando el célebre apoderado “El Pipo” se dio cuenta de que prometía, le dio hasta diez novilladas en la provincia. En Linares, en 1963, hizo su presentación cortando dos orejas y un rabo y saliendo a hombros por las calles.
El “Pipo” lo aclamó con este grito: “Linares se lo llevó; Linares nos lo devuelve”, en alusión a que Fuentes iba a ser el heredero de Manolete.
En 1965, en Málaga, tomó la alternativa. Se la dio Antonio Ordóñez en presencia de Carlos Corbacho y cortó las orejas y el rabo a sus toros. Confirmó en Madrid en un año decisivo. Hizo campañas con éxito en Hispanoamérica. Se casó con la hija del Pipo en un gran acontecimiento de la época. Hizo un toreo fino, elegante y con el mejor estilo.
José Fuentes se corta la coleta en 1977, aunque regresa a los ruedos en 1979. Y continúa en ellos hasta la década de los 90, ya en las últimas temporadas con apariciones fugaces.
Tras dirigir la Escuela Taurina de Linares, en 2006 se le ha nombrado director artístico de la Escuela de Tauromaquia de Guillena (Sevilla).
Fallece en Sevilla el 26 de mayo de 2023 a los 79 años.
Patrice Quiot