Le jeune con… (2)

 

Forte des conseils d’Encarnación, Ginette invita le jeune con, se fendit de deux billets a la plaza de toros nimeña et ensemble y allèrent voir un cartel typiquement sud-ouest composé de Christophe Aizpurua, Jean-Louis Haurat et Philippe Burgain devant des novillos de Jean-Charles Pussacq, affiche qui, paradoxalement, ne fit pas le « No hay billetes » espéré.

Le jeune con était assis à côté de Ginette. Elle avait essayé en vain de le dérider un peu en lui racontant des blagues appropriées à l’endroit du genre : « Pourquoi l’abbé Tis de Séville s’est vu refuser par l’évêque le concert de son groupe de chant au nom de « Flammes and Co ? », « Eh bé, pour cause de connotation diabolique, ma coune !!! ».

Mais rien ne se passait, comme ce fut souvent le cas pour Nîmes Olympique et comme c’était toujours le cas quand toréait Antonio Catalán Palazón “Toñete”.

C’est alors que la chose élaborée par Encarnación se produisit.

Mais, écoutons plutôt les témoins de l’événement :

« Lorsque j’ai vu le soleil qui rougeoyait, j’ai dit à mon voisin Bouzanquet : « Té, Marcel, c’est curieux, aujourd’hui le soleil se couche deux fois ! Ça doit être la faute des fusées ! »

« Nous étions en train de rectifier l’assaisonnement de la gardianne quand, avec Mme Bergogne nous avons appris cette terrible nouvelle : La buvette des arènes est en feu et ils se débarrassent des caisses de Ricard ! »

Ce qui était le cas.

Tout de suite, le jeune con à l’esprit aussi aiguisé à l’investigation que Mortadelo y Filemón, flaira le lío et comprit le stratagème.

Une copine de celle qui l’avait invité avait mis le feu à l’estanco afin que, profitant de la panique créée par la situation, la Ginette lui saute au cou, lui roule une pelle et tout et tout et qu’ainsi il se fasse définitivement compromettre devant tous ces aficionados qui, c’est bien connu, aiment bien larguer.

Imaginant la dimension que prendrait cette essoine morale, le jeune con se mit à hurler debout au quatrième rang des Tribunes Spéciales :

« Elle a essayé de m’embrouiller ; sûr, elle ne doit pas aimer ma façon de parler et lui préférer celle de ces imbéciles de commentateurs sportifs du style de Marion Rousse qui n’est pas au vélo ce qu’était Antoine Blondin ou celle de chroniqueurs taurins comme «Artillero» ou «Luis de la Cruz» qui étaient aux toreros français ce que le RN est au communautarisme. La Ginette, elle veut m’embrouiller. Pourquoi ? Eh bé, moi je vous le dis pourquoi. Elle veut m’embrouiller cette mégère pour que je la mène à la mairie et puis après à Ste Perpétue et ensuite au motif de nourrir les mistons pour que j’aille travailler chez Royal Canin à Vergèze et qu’ainsi j’abandonne mes activités de nommeur des lotos de l’Alliance Anti Corridas, d’animateur des karaokés des coiffeuses de St-André-de-Majencoules et que je ruine mon brillant avenir de futur chroniqueur taurin à « Radio Ecclesia». Jamais, jamais, jamais, jamais… !!! Garce ! Chipie ! Méchante femme ! »

Alors, droit comme le phare de la Gacholle, levant les bras au ciel comme le Ravi de la crèche, les joues gonflées comme l’ange Bouffarel, dix fois plus énervé que Simon lorsque le palco refuse les oreilles aux impétrants de la tarde et hors de lui, le jeune con né à Montpellier ensuqua la Ginette d’un coup du dictionnaire de Scrabble avant de l’exposer nue, attachée aux grilles des arènes en feu.

L’affaire fit grand bruit dans le « landau nîmois » comme on dit à l’Académie du 16 rue Dorée.

Les fougassettes furent vendues avec un crêpe noir, Christian Chalvet ferma définitivement son étude, JOL délaissa le bleu, Paul Hermé se rasa la barbe, «Chez Nicolas» mit la clé sous la porte, la Féria de Pentecôte fut à deux doigts d’être annulée, Enrique renonça presque à sa despedida nîmoise, Morante fit savoir qu’il arrêtait sa temporada et Manu dissolut l’Assemblée Nationale.

Le jury de la Cour d’Assises de Mus dans son unanimité condamna le jeune con à être assigné définitivement à Hénin-Beaumont (Nord) après avoir été exposé pendant dix jours, le dictionnaire de Scrabble dans la main droite sur le pilori du Mont Margarot.

Profondément choqué par ce verdict inique, et comme le fit Voltaire pour Calas, Maître Jacques-Jean Spons, ténor du barreau de Palavas, hooligan de Maître Floriot, exégète de Jacques Verges, défenseur des causes désespérées et adversaire infatigable des maladies vénériennes espagnoles reprit l’affaire depuis le début, auditionna l’oncle, Arlette, la cousine de la « Princesa », Sandrine Bonnaire, le pébron du mazet, Paco Senda, Marcel Bouzanquet, Mme Bergogne et établit la réalité du complot.

En excellent homme et fin juriste, Jacques-Jean Spons a interjeté appel du verdict auprès de la Cour de Cassation au motif légitime que le jeune con était… vraiment con !

Patrice Quiot