Le syndrome de la idiotez…

 

La vache l’avait bousculé.

Et il était tombé.

 

En se relevant.

Il se sentit tout drôle.

 

Quelque chose.

Avait changé.

 

Il tira la langue.

A la becerra.

 

Lui cracha.

Sur l’hocico.

 

Et cracha.

Au milieu du ruedo.

 

Son apoderado.

Lui en fit l’observation.

 

Il l’envoya chier.

Quitta le tentadero en tirant un gran corte de mangas au ganadero.

 

Et dans la venta où il avait ses habitudes.

Se gava de trois assiettes de migas et tomba un litron de tinto.

 

En rentrant chez lui.

Il décrocha les têtes de toros naturalisées accrochées au mur du salon.

 

Vida.

La penderie des trajes de luces.

 

Mit le tout.

Au grenier.

 

Et jeta au feu

Les revues taurines.

 

Il passa le lendemain et les jours suivants

A lire les aventures de «Babar ».

 

Et à manger.

Des «Choco Pops».

 

Pas d’entraînement.

Pas de campo. Nada.

 

Inquiète, sa femme et l’apoderado.

Appelèrent le docteur qui ordonna une radio.

 

Les spécialistes diagnostiquèrent.

Une perte de la mémoire de tout ce qui concerne les toros.

 

Syndrome de la idiotez (ou maladie de Caron).

S’appelait la pathologie dans le livre des medicos.

 

Il avait tout oublié des usages

Qui régissent ce monde.

 

Le dimanche suivant.

Il s’habilla de lumières en vêtement de papier crépon.

 

Fit le paseo en marche arrière.

Et torea de dos.

 

Il tua ses deux toros.

De deux estoconazos dans l’œil.

 

L’originalité de cette pratique.

Lui fit armer un gros taco.

 

On le répéta.

Six fois.

 

Et six fois.

Il fit pareil.

 

La commotion de la chose.

Ébranla le mundillo.

 

On le comparaît.

A Belmonte qui se serait fait Charlot.

 

La presse spécialisée s’en fit l’écho.

La télé le fit venir sur les plateaux.

 

Il s’y rendait habillé de papier crépon.

Et y lisait les aventures de « Babar ».

 

Il devint célèbre.

Et partit en Afrique.

 

Où dans un pueblo à côté de Bamako.

Il s’éprit d’une guenon bonobo.

 

Un soir de dispute domestique au sujet d’un encierro de bananes.

Elle lui jeta à la tête une noix de coco.

 

Il tomba.

Au sol.

 

En se relevant.

Il se sentit tout drôle.

 

Quelque chose.

Avait changé.

 

Il abandonna la primate et l’Afrique.

Rentra dans son village.

 

Ressortit les trajes de luces.

Et les têtes de toros naturalisées du grenier.

 

Acheta.

De nouvelles revues taurines.

 

Et reprit.

La routine d’un entraînement quotidien.

 

Il ne lisait plus les aventures de «Babar».

Et ne mangeait plus de «Chocó Pops».

 

Sa femme et l’apoderado.

Estimèrent qu’il n’y avait pas nécessité à aller consulter.

 

Patrice Quiot