Aignan mousquetaire…
Gers de routes serpentines, maïs et Folle Blanche, vent coulis sur clochers en girouette et soleil de troisième mi-temps. Villages tranquilles d’un sommeil paysan, douceur et naturaleza d’un vieux pays et flânerie dans un coin de France qu’aurait aimé chanter Péguy.
Aignan, pays de Rivière Basse ; Aignan dans la moyenne vallée de l’Adour. La Douze, le Midouzon et le Petit Midour y courent ; y courent aussi des ruisseaux, Bethaut et Bonne Font, Bordegeille et Candaou, Carchet et Douzens, ruisseau de Labadie, celui de Lahitte et bien d’autres encore.
La campagne y est belle, les maisons sont en tuffeau et leurs poutres noires du temps passé.
Aignan, première capitale de l’Armagnac.
Aignan, país de sinceridad.
Aignan, pays d’eux et d’elles.
Eux ne s’appellent ni Cyrano ou D’Artagnan, mais Paul, François ou Michel ; elles ne se nomment ni Roxane ou Milady mais Camille, Coralie ou Sandra.
Eux n’ont pas de rapière à la ceinture, des bottes de cuir aux pieds et de croix florencée sur la poitrine ; elles ne portent pas de robes de velours, de satin ou de taffetas enrichies de perles et agrémentées de broderies d’or et d’argent.
Eux et elles ne font pas dans l’intrigue et ne connaissent pas la fausseté des sentiments, mais sont eux des seigneurs et elles des princesses.
Leur culture est leur pays, la Gascogne leur emblème, les toros leur combat et c’est le cœur battant à l’unisson du rondeau et des palmas de fandango que, comme ils le font depuis 1993, ces gentilshommes et gentes dames diront une année de plus leur passion, le jour de Pâques. Ce jour où, il y a deux mille vingt-cinq années, «Marie Madeleine se rendit au tombeau» (Évangile de Jean 20, 1-9).dans les arènes André Lagoues, basses, rouges et blanches.
Le matin, à l’heure de la messe, avec les erales du Lartet de Peyrusse-Grande, d’origine Marquis de Domecq, devise vert, rouge et or ; señal brincada à chaque oreille que tueront Pablo Hernández le navarrais et Clovis Germain le gardois.
Un exemple de courageuse chevauchée ganadera pour deux promesses novillerils qui à Aignan se feront cadets de Gascogne.
L’après-midi, à l’heure des vêpres, avec les Valdefresno de Tabera de Abajo d’origine Lisardo Sánchez pimentée d’Atanasio Fernández, divisia carmin et Jaune ; señal ahigarada à gauche et muesca à droite que tueront Román Collado, le valencien, Christian Pajero, le chiclanero-biterrois et Solal Calmet, le nimeño.
Des toros de légende, ceux du 16 août 2006, quand à Béziers, Ivan García a gracié «Caraalegre» et ceux du 18 mai 2007 quand, avec les deux oreilles de «Lironcito», Sébastien Castella a ouvert à Madrid la première de ses six grandes portes pour trois mousquetaires qui viendront en terre gersoise l’épée de Charles de Batz de Castelmore dans le fundón del valor.
C’est avec eux, avec elles et avec tous, que ce dimanche 20 avril 2025, nous serons à Aignan qui, par son afición a los toros, porte haut et fier le «D’azur au lion d’argent, au chef de gueules à trois croissants du même» de son blason.
Patrice Quiot