La pluie d’Aignan…
Ciel de gris tórtola, brisa suave, árboles en flor…
A Aignan, le matin de Pâques donnait l’espérance d’un printemps ressuscité avec les Lartet de Jérôme Bonnet superbes de présentation et exigeants de moral ; un premier auquel il convenait de s’imposer, un second un peu distrait, un trois et un quatre avec ce qu’il fallait pour.
Un lot entretenido qui faisait oublier les nuages qui arrivaient.
Appliqué comme un bon écolier de CM2, courageux comme le sont tous ceux qui se mettent devant des bêtes irraisonnables mais guère plus et exempt de l’indispensable personnalité que seuls quelques-uns possèdent fut Pablo Hernández.
En scrutant le ciel qui s’assombrissait, je gardais du Navarrais deux faenas vagabondes, une épée desprendida à son premier et une caídita à son second.
Clovis le Nîmois tiene algo ; un quelque chose qui fait que, un plus que se nota, une manière qu’on remarque, une forme… “J’aime mieux tout de quelque chose que quelque chose de tout.” écrivait Hugo.
Certes, quelques scories encore, quelques dérapages au capote, certains muletazos décentrés et des épées un peu derrière, mais un début de faena à son premier, l’exploitation intelligente de la corne droite de son second, une présence en piste, une autorité naturelle me laissent à croire que dans le monde des toros Clovis aura son mot à dire et, à la sortie, son nom sur toutes les bouches me fit oublier le vent qui tournait aigre.
Il était deux heures quand vint la pluie…
Pas la pluie de Madrid un jour de Saint Patron et de José Tomás avec le toro de Los Bayones ou celle de Madrid encore pour les toracos de Miura et Padilla avec José Ignacio Ramos, pas la lluvia de Jerez le jour de la réapparition manquée d’Antonio de Ronda ou celle d’espoir du Valdemorillo des novilladas quand commençait la temporada.
Pas la pluie du quatrième mouvement de la Vème symphonie de Ludwig, pas la lluvia inespérée des couples amoureux sous l’abri des parapluies, pas la lluvia de Nîmes l’après-midi du mano a mano avec Emilio et de la vuelta d’Ojeda un lapin blanc à la main, pas la pluie sur le pays d’Amphyse un matin de Noël. Il y a si longtemps, pas la pluie qui fait luire le métal des toros de la carretera, pas la lluvia de Pampelune un jour de fête nationale quand Antonio José Galán tua presque à mains nues le Miura des deux oreilles et la queue.
Mais la pluie grise de ciel bas et d’oiseaux aux plumes mouillées, la pluie noire d’Hiroshima et des résidus de la fission, la pluie horrible du Santiago de Pinochet, de battle-dresses et de stade, la lluvia incestueuse de l’été de Marguerite Duras, la pluie des sans dents sous les cartons de la rue, la lluvia des tristes coïncidences de l’Albanie d’Ismaïl Kadaré, la pluie annonciatrice de la mort du Pape.
Pluie glaciale d’Aignan, pluie d’hiver, pluie de désespoir de gradins vides, pluie insipide des Valdefresno en absence de race et planchistes de catégorie, pluie de désespérance, de parapluie, de dérapage, de glissades et de boue pour Román Collado Gouinguenet en frissons de montagnes russes, pour Christian Parejo en gracieux lutteur de foire et en toreo de loterie et d’auto-tamponneuse pour Solal Calmet quand les forains avaient depuis longtemps fermé boutique.
« La pluie,
La longue pluie, avec ses longs fils gris.
Avec ses cheveux d’eau, avec ses rides,
La longue pluie
Des vieux pays,
Eternelle et torpide ! »
Pluie sans indulgence ; pluie sale de perdidas económicas, pluie d’illusions déçues.
Pluie d’Aignan qui me serra les dents, me tordit le ventre et me fit mal dormir dans un chalet en rondins de bois.
Datos
Arènes d’Aignan.
20/04/2024.
Matinal :
Quatre erales du «Lartet».
Vuelta au second et au quatrième.
Pablo Hernández: oreille, silence.
Clovis Germain : oreille, deux oreilles.
Clovis est sorti a hombros et a reçu le prix des organisateurs du Sud-ouest.
Pablo Hernández celui du club taurin Aignan y Toros.
Un quart d’arène.
Vespertina :
Toros de Valdefresno..
Román: silence, silence.
Christian Parejo : oreille, deux oreilles.
Solal : silence, saluts au tiers.
Un quart d’arène.
Patrice Quiot