Las Ventas : Momentos en flash-back… (1)

 

Les arènes de Las Ventas ouvrirent leurs portes le 17 juin 1931, deux mois après la proclamation de la Deuxième République (1931/1939).

Organisée par le maire socialiste Pedro Rico, l’inauguration prit la forme d’une corrida au profit des chômeurs à laquelle assistait, entre autres autorités, le président Alcalá Zamora, premier président de la Seconde République espagnole de 1931 à 1936.

A l’affiche, ornée du drapeau tricolore (rouge, jaune et violet), huit matadores : Diego Mazquiarán «Fortuna», Marcial Lalanda, Nicanor Villalta, Fausto Barajas, Luis Fuentes Berajano, Vicente Barrera, Fermín Espinosa «Armillita Chico» et Manuel Mejías «Bienvenida» pour estoquer des toros de différentes ganaderías.“Hortelano”, de Juan Pedro Domecq, combattu par Diego Mazquiarán « Fortuna», fut le premier toro qui sortit dans le ruedo venteño.

Le 21 octobre 1934, Juan Belmonte y fait le paseo pour la première fois. Attendant dans le tunnel des cuadrillas, le «Pasmo de Triana» a affirmé y avoir ressenti “el espíritu de Joselito » mortellement blessé quatorze ans plus tôt. Belmonte a expliqué que la plaza remplie à ras bord était, en quelque sorte, une idée originale de «Joselito», qui avait discuté des plans de Las Ventas avec son architecte principal José Espeliú. Les contributions spécifiques que «Gallito» aurait apportées au modèle primitif d’Espeliú demeurent inconnues mais, sans aucun doute, ses idées se sont reflétées dans le projet. Lors de cette corrida, Belmonte estoqua les toros murubeños de Carmen de Federico, ganadería qui avait été sauvée de l’abattoir par le même «Joselito».

2 avril 1936 : Lors d’une novillada, Juanita Cruz fut la première femme à y faire le paseo. Elle partageait l’affiche avec Niño de la Estrella, Miguel Cirujeda et Félix Almagro qui refusèrent d’alterner avec elle. Aussi, Juanita combattit en premier et l’un après l’autre deux novillos de la veuve de García Aleas, faisant la vuelta al ruedo à son premier adversaire. Elle ne put revenir à Madrid au motif de la guerre civile et s’exila en Amérique où elle prit l’alternative à Fresnillo (Mexique) le 17 mars 1940 des mains d’Heriberto García, coupant deux oreilles. Elle fit sa despedida en 1946 à La Paz (Bolivie) sans être revenue à Las Ventas et mourut à Madrid le 18 mai 1981, en pleine feria de San Isidro.

Las Ventas est la seule plaza au monde où la musique ne joue pas pendant la lidia. L’origine vient du 24 mai 1939 à l’occasion du premier festejo organisé après la guerre civile et où se produisit une grosse bagarre entre les partisans de Marcial Lalanda et ceux de Domingo Ortega qui voulaient que la banda anime sa faena comme elle l’avait fait avec Lalanda. La reyerta fut d’un tel calibre que, dès lors, il fut convenu que la musique ne jouerait plus à La Monumental.

20 octobre 1940 : Accompagné du ministre espagnol des Affaires étrangères, Ramón Serrano Suñer, beau-frère de Franco, ce qui lui valut le surnom de «Cuñadísimo», le Reichsführer-SS Heinrich Himmler assista à la corrida à laquelle participaient Marcial Lalanda, Rafael Ortega “Gallito” et Pepe Luis Vázquez. L’affiche était de couleur rouge portant la croix gammée nazie. La célébration commença à quatre heures et quart de l’après-midi, mais après la mort du troisième toro, elle dut être suspendue en raison du mauvais temps. Interrogé sur ce dont il avait été témoin, le Reichsführer répondit que «no había acudido nunca en directo a un espectáculo tan sangriento ».

16 juillet 1947 : Dernière corrida de «Manolete» à Madrid à l’occasion de la corrida de Beneficencia. Au cartel : Gitanillo de Triana, «Manolete»  et José Martin Vasquez ; toros de Fermin Bohórquez. Les chroniques racontent que le public de la Monumental l’attendait et s’était moqué de lui en lui lançant plusieurs commentaires blessants du type : « ¡ Ya era hora de que vinieras a Madrid ! ». Le deuxième de son lot, «… un toro áspero y manso de Bohórquez, derrotó de forma seca y le hirió en la pierna izquierda. “Manolete”, sin embargo, continuó su faena mientras un hilo de sangre le bajaba por la pantorrilla tiñendo la media. Tras entrar a matar, entró en la enfermería de la plaza. Finalmente, el público se puso en pie y le pidió las orejas como recompensa a su valor y pundonor. ». Un mois et douze jours avant Linares.

Le 17 mai 1949, Luis Miguel Dominguín fut l’acteur d’un événement inscrit dans l’histoire de la Monumental madrilène. Ce jour-là, le torero s’autoproclama numéro un, fait vécu avec enthousiasme par ses partisans, mais avec de nombreuses manifestations de désapprobation de la part de ses détracteurs. Cet après-midi de San Isidro, Dominguín qui partageait l’affiche avec Luis Parra “Parrita” et Manolo González devant une corrida de la Viuda de Galache fut accueilli très froidement par les tendidos bondés de Las Ventas. Vuelta al ruedo à son premier, mais «con el cuarto de la tarde, instrumentó una faena que contagió al entusiasmado público asistente, a pesar de no ser rematada con la espada. No obstante le fue concedida la oreja de su enemigo ». Alors, allant au centre de l’arène, Luis Miguel fit signe avec l’index de la main droite qu’il était, lui, le numéro un de la tauromachie, ce qui suscita non seulement des discussions passionnées dans les gradins, mais aussi une controverse qui allait durer de très nombreuses années.

A suivre…

Patrice Quiot