«Gómez Cardeña»…

 

D’Utrera à El Palmar de Troya, la route menant à Villamartín longe la lagune et la finca de Zarracatín d’où part un sentier à droite ; on dépasse le Rancho de Villalba avant d’arriver à «Gómez Cardeña», le domaine de 1 341 hectares typiquement andalou où la chaux et l’ocre des murs de pierre préservent l’air que lui a légué Juan Belmonte, là où il rêvait de vivre et où il mit fin à ses jours d’une balle dans la tête le 8 avril 1962 à l’âge de 69 ans.

La première mention de «Gómez Cardeña » remonte au XVIe siècle quand le lieu fut donné par le roi Felipe II à Guillén de las Casas (circa 1540 – circa 1595), ancien gouverneur du Yucatan et Grand Trésorier d’Andalousie puis passa entre différentes mains jusqu’en 1934, date à laquelle Francisco de Borja de Silva y Fernández de Henestrosa, marquis de Zahara, le vendit à Juan Belmonte.

Aujourd’hui, les petits-enfants du «Pasmo de Triana», les Beca Belmonte, fils de Blanca et les Arango Belmonte, fils de Yola, sont les gardiens de ces murs, salles, chambres, arènes et jardins où Juan Belmonte flâna aux côtés de personnalités telles que Sebastián Miranda, Ignacio Zuloaga, Gregorio Marañón, Mariano Benlliure, Ramón Pérez de Ayala, Edgar Neville… Car Belmonte était non seulement un torero atypique de son époque, mais plus encore dans la mesure où sa vie transcenda les arènes et s’inscrivit dans cette génération de 27 où la culture atteignit son apogée.

Soixante-trois ans après la mort du torero, «Gómez Cardeña» conserve la même entrée avec le nom de la finca inscrit sur fond de céramique ; derrière la porte principale, à gauche et vers l’intérieur, s’étend un jardin parsemé d’arbres feuillus, dont des citronniers, des oliviers, des grenadiers, des cyprès et des palmiers ; d’arbustes comme le laurier et le laurier-rose et de haies de romarin qui serpentent à travers l’albero, dominant tout l’extérieur.

Le porche voûté précède l’entrée de l’une des pièces principales. Il faut franchir un imposant portail en fer forgé – provenant d’une autre de ses propriétés, «La Capitana» – qui, de l’intérieur, laisse entrer les rayons du soleil, créant d’étranges motifs sur le sol rougeâtre et usé, comme dans la plupart des pièces.

 

Et dans cette pièce, à droite dans un coin donnant sur une cheminée blanche où reposent plusieurs volumes du Cossío et un portrait de Belmonte, un petit canapé et deux fauteuils entourent une table basse ; deux fenêtres y laissent entrer la lumière ; c’est là que, l’après-midi du 8 avril 1962, le «Pasmo» mit fin à sa vie.

À l’intérieur, une autre des nombreuses pièces, celle donnant sur l’arène, abrite un portrait de Belmonte par Zuloaga. La porte de la pièce ouvre sur les arènes de tienta dont les burladeros rouges sangre de toro portent la divisa de la ganadería aux initiales de Juan, Yola et Julia.

 

Un long couloir, qui mène à plusieurs pièces et salles de bains, a été conservé tel que son propriétaire l’avait voulu : des coffres ramenés d’Amérique, des étagères remplies de livres, des photographies de ses filles et petits-enfants ; des bois de cerf, d’imposantes peintures à l’huile à thème religieux…

A «Gómez Cardeña», il n’y a pas grand-chose qui ait à voir avec le toro comme si dans son refuge, Belmonte semblait avoir voulu oublier l’arène…

Sources : ABC/Toros en Sevilla.

Patrice Quiot