Triomphes de Daniel Luque et Marco Pérez au terme d’une corrida humide mais entretenue…
Trois quarts d’arène environ par temps changeant finissant par devenir plus clément à l’heure du paseo. Six toros d’Álvaro Núñez corrects de présentation et donnant un jeu inégal, bien que satisfaisant la plupart.
Alejandro Talavante : oreille et saluts.
Daniel Luque : deux oreilles et saluts.
Marco Pérez : oreille et oreille.
Si toutes les corridas ont leur propre histoire, il en est qui en ont une particulièrement gratinée ! Comme celle du jour qui en fait partie car toutes les prévisions météo étaient unanimes depuis pas mal de jours et effectivement, à quelques heures du paseo, il était difficile de penser qu’elle pourrait avoir lieu…
Et pourtant, à l’approche de l’heure fatidique, une lueur d’espoir a fait place au plus profond pessimisme préalable, les gens commençant à affluer et les portes à s’ouvrir pour en fin de compte, après le jet de quelques blocs de sciure, ressentir Carmen comme un signal libératoire.
Je crois que personne ne l’a regretté car cette corrida aura finalement réservé quelques moments de total intérêt. En préalable, j’ai envie de dire un grand merci à tous ceux qui l’ont rendue possible, empresa, toreros et areneros.
Et un enhorabuena pour les protagonistes de la mise en scène avec l’artiste floral Aurélien Guintoli et le dessinateur Fabien Seignobos.
Un univers dans lequel sont entrés notamment en vrac funambule, pianiste, tournesols…
Et bien entendu l’orchestre Chicuelo II avec son chef Rudy Nazy qui a coordonné les interprétations avec la soprano et les chœurs… Olé !
Pour revenir aux toros, Alejandro Talavante a régalé les aficionados avec un bon premier adversaire, faisant admirer son maniement du capote avant deux rencontres sans histoire suivies d’une competencia applaudies au quite avec Luque. A la muleta, début élégant en ouverture d’une leçon magistrale relevée à bâbord avant entière. Avec le cuarto, l’Extremeño se distingua sur des chicuelinas de réception avant un tercio de piques où son opposant provoqua un batacazo sur la seconde rencontre. Brindis à l’assistance d’une faena débutée par rodillazos de gala, « Tala » se montrant entreprenant par la suite, mais la faena n’eut pas le même écho que la précédente, deux pinchazos avant entière venant annihiler tout espoir de récompense.
Incontestablement, Daniel Luque a réalisé une œuvre de grande musique avec son premier client, un toro un peu étrange d’emblée, manso semblant avoir quelque mal à trouver ses marques. Mais par sa façon de l’entreprendre, le maestro de Gerena mit tout le monde d’accord après seulement deux séries suffisantes pour lui apprendre les bonnes manières et le mettre dans sa canasta ! Poder, dominio, justesse, élégance et j’en passe, bref du grand art logiquement récompensé par deux oreilles après entière. Avec le quinto, auteur de belles arrancadas au cheval, Luque brinda à son ex-apoderado Jean-Baptiste Jalabert une faena qui comprit à nouveau de bons moments, bien que le bicho était loin d’avoir le même répondant. Daniel sut toutefois rester digne, saluant après estocade au second coup. Mais quel talent !
Marco Pérez, dans le jardin de son apoderado, ne voulut pas être en reste, et en fin de compte il s’est retiré lui aussi sur les épaules d’un costalero après deux trasteos honorables récompensés chacun par un trophée. Après deux rencontres, la seconde homéopathique, le jeune homme aux bas noirs brinda au respectable sa première faena au cours de laquelle il étala ses bonnes intentions en compensant par son énergie le manque de fonds de son opposant. Un bel effort récompensé d’un trophée après entière au second envoi. Avec celui qui fermait la séance, Marco allait recevoir l’oreille de la grande porte après capoteo varié et une belle competencia aux quites avec son chef de lidia. Il brinda à la Reine d’Arles Amélie Laugier et après un bon démarrage, il dut prendre en compte les difficultés inhérentes à un toro qui baissa assez rapidement. Une nouvelle fois, le Salmantino appuya sur le champignon, ne baissant pas sa garde et finissant par s’imposer à base de grinta lui permettant de se voir concéder le fameux sésame après entière au second coup. Pour sa présentation de matador dans cette arène, il ne pouvait pas espérer mieux, non ?