Adieu Álvarito, Adieu Maestro… Noblesse oblige…
Le dernier des 4 cavaliers de l’Apothéose nous a quittés ce mardi 18 novembre 2025 à « la madrugada ».
Quelques mois à peine après Rafael Peralta, c’est un autre grand Monsieur qui disparaît.
Il va rejoindre ses compagnons Ángel et Rafael Peralta et Lupi. Laissons-nous rêver qu’ils dessinent ensemble cette étoile qui a tant marqué les paséos des années 70-80.
Avec la disparition d’Álvarito se termine cette histoire, celle de ces 4 cavaliers-stars qui ont ouvert de nouveaux horizons. Méjanes se rappelle !!!
Mesure-t-on encore aujourd’hui l’influence de ces 4 grands toreros à cheval sur la tauromachie équestre et sur l’équitation en général ? Et pas seulement dans le sud de la France !
Ce grand rejoneador que fut Álvaro Domecq Romero avait un style bien à lui, sans fantaisie, mais un toreo sincère « offrant le pecho aux cornes ». Il allait à la tête en rentrant et en pesant sur le terrain du toro. Il se trouvait toujours face aux cornes au moment de la réunion et il clouait à l’étrier. Neptuno et Universo en témoignent, ainsi que le fameux Opus 72 avec son sitio si particulier : il allait droit de face après avoir cité le toro dans un mélange de changements de pieds et de balancer des épaules et des hanches dans le mouvement en avant d’une grande mobilité. Une sorte de danse qui fixait le bicho et captivait le public… Don Álvaro s’est payé le luxe de toréer à plusieurs reprises des toros en pointes lorsqu’il actuait seul.
Il était aussi écuyer, garrochista de talent, il fut Champion d’Espagne de Doma Vaquera en 1973, ganadero de toros bravos et surtout un grand amoureux du cheval PRE et de l’Art Equestre. Il a doté l’Espagne d’une École Andalouse, devenue Royale, d’Art Equestre en 1973.
Cette école, il en est le fondateur. Elle a pris naissance dans sa Finca « Los Albujeros » grâce à sa volonté inébranlable et à ses fonds personnels.
Pour ce faire, il n’a pas hésité à se rendre à l’Ecole de Vienne dès 1970 pour y parfaire ses connaissances et y recevoir l’enseignement de l’écuyer Lauscha.
Il me souvient du discours inaugural, en présence du Roi Juan Carlos. Le spectacle présenté s’intitulait « Cómo bailan los caballos andaluces »…
Résonne encore en moi son allocution, au centre du picadero, qui se terminait sur un ton de cérémonie et de grande fierté. Chaque syllabe se détachaient : Bail-lan-do ; Bail-lan-do…
Il a donné ses lettres de noblesse à l’équitation ibérique qui rivalise à présent avec Vienne, Saumur et l’École Portugaise. Des échanges et interactions entre les quatre institutions se multiplient chaque année.
Álvaro Domecq a reçu de nombreuses distinctions : Caballo de Oro ; Médaille de Andalucía ; Hijo predilecto de Jerez ; Broche d’Honneur de l’Ecole de Vienne en 2008 et depuis 2021 le manège de l’Institution porte son nom : « Picadero Álvaro Domecq »…
Ce même manège qui, ce 18 novembre, après l’annonce de sa disparition, a vu se réunir le personnel, les élèves, les jinetes, « Yute », son dernier cheval, pour une minute de silence chargée d’émotion.
Los Alburejos, quel lieu mythique !… malheureusement vendu récemment à un promoteur étranger, véritable sanctuaire de l’Aficion et de l’Histoire familiale où sont rassemblés les souvenirs à la gloire des grands chevaux qui ont fait la réputation des Domecq : Patio de Universo ; Patio de Neptuno et surtout Patio de la Espendida avec sa statue.
La Célèbre Espléndida, jument torera d’Álvaro Domecq y Diez, reconvertie en poulinière, engendra 13 poulains qui furent, selon mes sources, tous toreros. J’ai eu la chance d’acquérir l’un d’entre eux que les aficionados de mon époque ont bien connu : CARIÑOSO.
Los Alburejos, c’est aussi et surtout l’encaste Domecq de Torestrella. Cet élevage fondé par Álvaro Domecq y Diez a marqué de son empreinte la tauromachie. Il reste encore aujourd’hui un gage de qualité, de bravoure et d’une grande noblesse.
N’omettons pas le spectacle : « A Campo Abierto » véritable hymne au travail obscur et quotidien du mayoral et des vaqueros qui travaillent dans l’ombre. Toutes les faenas de campo y étaient représentées en différents tableaux.
Oui le nom d’Álvaro Domecq peut s’inscrire comme celui de son père avant lui, en lettre d’Or sur le grand livre du Toro et du Cheval. Une aficionada dira de lui « En cada caballo espagnol vive un poco de Usted, Maestro. »
Le lendemain de sa disparition le mercredi 19 novembre, lors des obsèques à la Cathédrale de Jerez, il était accompagné de 12 écuyers de l’École parmi eux quelques-uns des plus anciens et de son fidèle cheval. Les chevaux eux-mêmes semblaient recueillis, sentant l’heure grave. Le martellement des sabots, sur le pavé jerezano, cadençait tristement le cortège. Une haie d’honneur pour un dernier Adieu salué par une salve d’applaudissements. Le mundillo et les amis étaient nombreux à soutenir la famille endeuillée. Difficile d’imaginer un plus bel hommage !
Repose en paix Maestro…
Freddy Porte



