Texte à étudier : El Puerto de Santa María, 11 août 2005.

Vanille et coq noir.

C’est une formule usée que les aficionados radotent lorsqu’ils vont voir une corrida au Puerto de Santa María, dans la baie de Cadix, au bord du Guadalete, le fleuve de l’oubli.

C’est la phrase de Joselito el Gallo : « Qui n’a pas vu des toros au Puerto ne sait pas ce qu’est un jour de corrida ! »

Le Puerto célébrait ce week-end les 125 ans de sa plaza avec deux corridas haut de gamme.

Dimanche avec El Cid, César Jiménez et Salvador Vega.

Samedi avec Rincón, El Juli et le Niño.

Le Niño, c’est ainsi que ceux de sa peña de la Puebla del Río, appellent Morante de la Puebla.

Le Niño a tout de même 26 ans et possède 100 hectares de rizières, une flottille de bateaux de pêche, des appartements et, chez les siens, une réputation de « torero fino ».

La Puebla del Río, 11.000 habitants, village rizicole, vire à la banlieue-dortoir de Séville.

La géopolitique de sa grand rue est un bon résumé de la sociabilité populaire de la basse Andalousie.

L’Athénée libertaire jouxte le Centre culturel Al-Andalus, ainsi que l’énorme siège peint en vert pistache des supporters du Bétis Séville.

Il fait exactement face à celui, moins important et rouge cerise, des fans du FC Séville.

À quelques mètres, l’ermitage San Sebastián exhibe le pallium de la confrérie du pèlerinage du Rocío.

La peña culturelle Morante de la Puebla est à un jet d’écorce de graine de tournesol.

450 membres, des photos du héros et une de ses déclarations après un triomphe à Séville : « Sortir par la Porte du Prince, c’est comme parler avec Dieu ! »

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Cependant, samedi au Puerto, avec Silvoso, toro de Parladé, la communication divine était coupée.

Silvoso est manso et Morante, de le voir comme ça, franchement ça le dégoute.

Il tire la gueule sous la terrible chaleur.  

Il fait 43° et il faut encore aller saluer le président de la course.

Il y va en traînant la semelle.

On dirait un cancre appelé au tableau noir !

À l’évidence, il préférerait chasser la perdrix, courir avec ses chiens ou jouer au ballon avec ses potes.

Mais plus tard, à la fraîche.

Bon, il y a aussi ce toro.

Désolé pour vous, mais il ne vaut rien pour moi.

Il lui donne deux passes de la droite, sans y croire.

Comme s’il essayait de fourguer des actions d’Eurotunnel !

En plus, Silvoso le regarde lui au lieu de regarder la muleta.

N’insistons pas.

« Dans cette vie, disait au Puerto un peintre raté, ami d’enfance de Rafael Alberti, il faut faire très attention de ne pas se laisser mener par la volonté… »

« Morantissime de la Puebla » de… avec des dithyrambes de… »

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Sur la base de l’extrait d’auteur repris ci-dessus, il vous appartiendra  d’étudier :

1)  LE TEXTE

–   S’agit-il d’un texte ou d’un document?

–   Relève-t-il  de la littérature fictionnelle ou non fictionnelle?

– Préciser l’auteur, l’année de publication, l’éditeur éventuellement.

–  Préciser le genre littéraire.

2)  LE CONTEXTE

–   Situer le « Puerto de Santa María » par rapport à Villanueva del Arzobispo.

–  Préciser les villes ou villages traversés par le cours du «Guadalete ».

–  Traduire dans la langue de son énonciation la phrase : « «Qui n’a pas vu des toros au Puerto ne sait pas ce qu’est un jour de corrida».

–  Resituer « Salvador Vega » dans le contexte tauromachique de l’époque.

–  Qu’englobe la notion « Al Andalus » ?

–  Comment comprendre l’idée « Athénée libertaire »?

3)  LE SYSTEME DE COMMUNICATION/ ENONCIATION

–   Qui parle à qui?

–   A quel niveau ?

–  Définir ce qu’est un «torero fino» ?

–  Citer d’autres toreros qui pourraient être ainsi qualifiés.

4)  LE NIVEAU DE LANGUE

–  A quel niveau de langue se situe : «La géopolitique de sa grand rue est un bon résumé de la sociabilité populaire de la basse Andalousie» : Familier, courant, soutenu ?

–  A quel niveau de langue se situe : «Comme s’il essayait de fourguer des actions d’Eurotunnel !» : Familier, courant, soutenu ?

5) GRAMMAIRE

–  Dans la phrase « et il faut encore aller saluer le président de la course », l’adverbe  indique :

A) La persistance d’une action ou d’un état à un moment donné (par opposition à ne… plus) ;

B) L’antériorité dans une phrase négative, par rapport à un événement ou un état prévu mais non réalisé (par opposition à déjà) ;

C) La répétition ; (de nouveau) ;

D) L’addition ; (en plus, en outre, davantage).

6)  LES FIGURES DE STYLE

–   Dans quel registre de langue se situent les expressions : «il  tire la gueule » et « trainant la semelle » ?

– Comment se nomme le procédé littéraire employé dans l’expression : « à un jet d’écorce de graine de tournesol » ?

–  Comment se nomme le procédé littéraire employé dans l’expression : « le fleuve de l’oubli » ?

Vous disposez du temps d’une faena de muleta selon les articles 82, 83 et 84 du Règlement  Taurin Municipal de la FSTF.

x 3 (soit 30 mn).

Datos :

–  Jacques Durand est un journaliste taurin français et un écrivain né le 12 novembre 1941.

Longtemps chroniqueur taurin pour le journal Libération, il en a été congédié le 1er juillet 2012, au grand dam de l’ancien rédacteur en chef du journal, Jean-Marcel Bouguereau.

Jacques Durand a été aussi rédacteur en chef des émissions taurines sur Canal+, et collaborateur du magazine télévisé sur France 3 Sud : Face au Toril. Il publie désormais une page taurine régulière aux éditions Atelier Baie.

Œuvres :

L’Habit de lumière, voyage en tauromachie, avec Jacques Maigne, éditions Ramsay, 1985.

Cévennes (ill. Alain Gas), Montpellier, Espace Sud, 1988.

Avec Eddie Pons, Petit nécessaire de toilette à l’usage de ceux qui s’astiquent avant la corrida, Montpellier, Espace Sud, 1991).

Humbles et Phénomènes, Éditions Verdier, Lagrasse, 1995.

Histoire et Tauromachie, mythes et réalités, avec Bernard Lefort, éditions du Félin-Sauramps, Paris,

Rafael le chauve (biographie de El Gallo (Rafael Gómez Ortega)), Éditions Verdier, Lagrasse, 1996.

Chroniques de sable, éditions Atlantica, 2000.

José Tomás Román, biographie du matador José Tomás, photos de Marie Fouque, éditions Actes Sud, 2004, Carnets taurins de Jacques Durand, éditions Atelier Baie, 2008.

Morantissime de la Puebla, de Jacques Durand, avec des dithyrambes de Fernando Arrabal, éditions Atelier Baie, 2008.

Toros, la tauromachie dans l’art populaire, avec Henriette et Claude Viallat, Jean-Pierre Loubat, Alain Montcouquiol, éditions Gaussen, 2010.

Des toros à perpet, illustrations Bruno Doan, Atelier Baie, Nîmes, 2012.

Gueules de toreros, avec Blaise Volckaert, Éditions Passiflore, 2013.

Tabaco y Oro, avec Blaise Volckaert, Éditions Passiflore, 2017.

Prix :

Plume d’aigle 1985

Cabri d’or 1989.

–     Fernando Arrabal né le 11 août 1932 à Melilla (Espagne), est un poète, romancier, essayiste, dramaturge et cinéaste espagnol.

Patrice Quiot

(Photo du haut : monument en hommage à Paquirri situé sur le parvis de la plaza de toros du Puerto, réalisé par le sculpteur Manuel de la Fuente.)