On sait très bien qu’un des problèmes parmi les plus importants dans le domaine de la tauromachie, pour sa survie, est bel et bien la transmission de ses valeurs envers les plus jeunes. Jusqu’à présent, c’est ce qui se faisait peu ou prou, mais l’évolution de la société qui a pris quelques virages parfois inquiétants, fait que pas mal de choses commencent à être remises en cause. Et de fil en aiguille, on sent bien que de nouveaux prophètes s’escriment à vouloir changer la donne, d’où la volonté chez certains d’opposer une résistance afin de faire que nos traditions continuent à vivre et à être respectées…
Invité avec quelques-uns de mes compañeros à rencontrer le maire de Mont-de-Marsan avant la novillada non piquée matinale du dimanche, c’est dans un local du Plumaçon, à l’heure du café, que Charles Dayot, maire de Mont de Marsan, a tenu à nous exposer son projet, avec à ses côtés son adjointe Nathalie Garcia, qui surfe sur plusieurs domaines, notamment la défense des traditions et cultures locales, ainsi que le développement d’une Maison des Traditions, ce qui bien sûr expliquait sa présence.
A ce sujet, le maire nous a fait part de son intention de mettre en place une structure proche des arènes, une sorte de lieu rassembleur dédiée à la tauromachie sous toutes ses facettes…
« Il ne s’agira pas forcément d’un site directement lié à la feria, mais plus généralement, quelque chose tourné sur nos traditions, ce qui rejoint bien entendu tout ce qui est tauromachie, landaise comme espagnole, mais aussi la culture gasconne comme la gastronomie, la chasse… Bien sûr, ça va dépendre des moyens que l’on aura, on discute aussi avec la Fédération de la Course Landaise pour bâtir un site vraisemblablement du côté du fronton.
Ce qui me tient aussi à cœur, et on est en train d’y travailler, c’est de réaliser quelque chose qui pourrait s’appeler école de l’aficion. On a rencontré avec Nathalie un certain nombre d’acteurs, ce qui pourrait nous permettre au printemps, par exemple, jusqu’à la Madeleine, de pouvoir le samedi matin pendant deux heures organiser de petits ateliers pour que les jeunes puissent venir aux arènes afin de participer, l’idée étant de donner le goût, de culturer, d’inverser un peu le logiciel. Aujourd’hui, c’est moi qui emmène mon gamin aux arènes, mais ce qui serait bien, c’est qu’ensuite la demande vienne d’eux pour y aller avec leurs parents !
Chez nous, de par le tissu professionnel, avec la base aérienne notamment et d’autres administrations, il y a pas mal de néo-montois qui ne sont pas forcément au fait des traditions locales, l’idée étant également pour eux que leurs gamins puissent s’en imprégner, se familiariser pour après inciter leurs parents à les mener aux arènes.
En fait, on s’inscrit quelque part dans ce que défend le label Esprit du Sud, mais l’initiative de ce que j’évoque nous est propre car franchement, c’est un peu dommage de n’utiliser cet outil que cinq jours par an, non ?
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On a commencé par décorer les coursives des arènes avec notamment des affiches d’époque, là où les aficionados passent forcément pour gagner leur place. On les laissera en permanence et concernant les visites des arènes, il arrive que l’Office du Tourisme envoie des personnes désireuses de les découvrir. Ce n’est pas institutionnalisé, mais l’idée, c’est de pouvoir rendre la chose possible pour ceux qui veulent découvrir les coulisses. Je ne sais pas s’ils feront par la suite de bons aficionados, mais la démarche aura au moins été faite. (Nathalie Garcia : Romain, le responsable des arènes, leur explique du mieux possible et il est assez fréquent que parmi les retours, certains disent qu’il leur a donné envie d’aller voir une corrida !).
On a aussi un petit fonds d’affiches, ça a commencé il y a trois ans quand on a fait l’affiche avec Domingo Zapata, un Majorquin qui vit à New-York. On a réussi à l’avoir par Sébastien Castella. Il a colorisé une affiche et il a débarqué une semaine avant, au cours de laquelle après avoir fait la fête, il nous a demandé de la peinture pour réaliser une fresque assez importante. On a commencé comme ça, avec sa fresque, ensuite on a demandé à Diego Ramos de nous faire quelque chose et c’est comme ça qu’il nous a transmis une tête de toro. Récemment, nous avons demandé au peintre montois Guillaume Toumanian qui n’est pas taurin, mais qui s’exporte un peu, de nous faire une toile et on va essayer de monter une galerie dans les arènes, de façon à y entrer même quand il n’y a pas de toros. C’est vrai qu’il y a une demande pour un musée taurin, ce qui représente une structure plus importante et coûteuse en fonctionnement, nous allons essayer à notre niveau de tendre vers ça, d’où cette idée de galerie.
En ce qui concerne l’aspect pédagogique du projet, je fais référence à la course landaise dont les responsables ont une petite mallette, c’est aussi une piste qui pourrait s’appliquer à la corrida. Questions locaux, on a ce qu’il faut. Il ne manque plus qu’à coordonner tout ça pour faire vivre ce projet qui a été évoqué l’an dernier lorsque nous nous sommes présentés aux élections.
Les questions de budget commencent à faire l’objet de réflexions, on ne peut pas encore dévoiler le détail, d’autant plus que l’on va certainement se tourner notamment sur la Fédération de la Course Landaise pour envisager un rapprochement.
Pour l’heure, pour ce que l’on nous retourne, ce projet semble parti pour être bien accueilli. Nous ne sommes pas dans un lieu où se fomente une contestation virulente comme on peut en voir ailleurs. En outre, une école de l’aficion n’est pas une école taurine, on n’apprend pas à toréer, mais à mieux percevoir les codes, les documenter, leur montrer un peu de pratique, les coulisses, tout l’écosystème qui est autour, pour aller vers la capacité à répercuter les informations dans leur entourage.
Quand on regarde les gradins, on s’aperçoit qu’il y a très peu de jeunes, d’où l’importance à aller vers eux pour qu’à leur tour, ils aillent ensuite vers les autres. C’est tout le sens de notre démarche et ça s’appelle la transmission. Par ailleurs, j’insiste sur l’aspect plus global de ce projet basé autour de la culture locale sous tous ses aspects, et pas uniquement sur les toros. Mais dans laquelle les toros ont évidemment leur place… »
Dans un futur proche, gageons que l’on puisse vérifier l’évolution de ce projet autour et dans le Plumaçon. L’idée est séduisante, et si elle reçoit le soutien de toutes les composantes de l’aficion, on est certainement très proche d’un virage qui par ce moyen, sera probablement plus facile à négocier. Ojalá…