ARLES
Beau temps, arènes quasiment pleines, trois toros de Garcigrande (1, 2 et 5), deux d’Adolfo Martín (3 et 4), et enfin le dernier de Núñez del Cuvillo, les 5 et 6 étant crédités de la vuelta posthume.
Sur fond rose, remarquable décoration de Diego Ramos. A l’issue du paseo, vibrante Marseillaise reprise par les aficionados. Au fur et à mesure du déroulement de la lidia, excellentes interprétations des solistes, des chœurs et de l’orchestre Chicuelo II.
Alejandro Talavante (oreille, saluts et deux oreilles) a lancé les débats face à un Garcigrande par bonne réception capotera jusqu’au centre. Son opposant fonça sur le groupe équestre sans y être invité, bien contenu par le lancier, tout comme sur un autre assaut. Excellente entame de faena, Talavante restant stoïque dans ses attitudes, pieds joints au centre. Il se fit ensuite légèrement bousculer lorsque la musique démarrait, mais se reprit bien, notamment sur des séquences gauchères, avant final par manoletinas serrées puis entière au second envoi qui libéra un trophée. Le troisième offrit au piquero un tour de montagnes russes bien contenu avant une seconde rencontre applaudie. Par la suite, l’Adolfo, dont on avait déjà décelé le manque de forces, ne permit guère à Alejandro de se mettre totalement en évidence. Il fit toutefois le maximum pour tenter de proposer quelques échanges au ralenti certes agréables, surtout à bâbord, mais quasiment dénués de transmission, et pour cause. Avec le quinto, « Bandolero », de Garcigrande, les choses allaient prendre des contours plus colorés. Piques protestées, puis saluts aux banderilles de Miguelín Murillo avant que « Tala » ne se régale et nous régale avec une œuvre finement ciselée, composée de morceaux de choix sur les deux rives. De la belle ouvrage rematée par des bernardinas d’école avant entière qui libéra deux mouchoirs blancs et un bleu, avec effervescence des grands soirs sur les étagères…
Andrés Roca Rey (oreille, silence et deux oreilles) débuta avec un premier client qui fit une entrée plutôt mollassonne, le Péruvien relevant ensuite la sauce par somptueux redondos sur l’air de Granada. Les choses prirent peu à peu de l’importance, Andrés prenant son temps pour soumettre son adversaire dans une muleta tenue avec assurance et détermination Final encimista, avant entière. L’Adolfo Martín sorti en quatrième position donna rapidement des signes de faiblesse et plus tard, à la muleta, ses conditions ont eu pour première conséquence de donner peu d’importance au labeur d’Andrés. Ensemble sans grand éclat, malgré quelques points lumineux qui ne purent toutefois trop éblouir le conclave. Entière tombée. Ce fut une tout autre chanson avec l’ultime, « Rosito », de Núñez del Cuvillo, accueilli par un superbe enchainement de véroniques/chicuelinas/rebolera. Le ton était donné et après deux rencontres puis un bon second tercio, Andrés brinda à l’assemblée une faena débutée par statuaires qui allait atteindre les sommets grâce à des séquences aussi enlevées qu’ajustées. De quoi enflammer les travées jusqu’au colofón d’un faenón sous forme d’un espadazo sin puntilla. On ne pouvait pas trouver meilleur final, non ?
Sortie a hombros sous les vivats pour deux maestros qui ont manifesté en outre une belle entrega et une saine competencia, notamment dans les quites. Ils ont su en outre, à chaque fois que c’était possible, connecter avec les aficionados… qui le leur ont bien rendu.
Et puis, pour tout dire, voir autant de gens reprendre le chemin des arènes et remplir presque à ras bord les étagères, ça a franchement mis pas mal de baume au cœur. Et les voir repartir contents encore plus…