PATRICE
Cojo soy.
Et cojo resterai.
De toda.
La vida.
Cojo
Je vais.
De Nîmes.
A Honolulu.
Marchant.
Dans les chemins de traverse.
En avançant.
La pierna.
Floja.
De necesidad.
Cojo
Je vais.
Toquant.
Le risque.
Que je devrais.
Craindre.
En me mettant.
Devant lui.
Et le citant.
De mon indifférence.
Cojo
Je vais.
L’ayant dans mon corps.
Et mi mente.
Tout enfant.
Connue
La cornada.
Me da igual.
Et la prendre.
M’indiffère.
Cojo
Je vais.
Le pied.
En trapazo.
La cheville.
En espantada.
Y la rodilla.
Al matadero.
Cojo soy.
Et cojo resterai.
Et
J’écris.
Comme.
Je marche.
De biais.
De travès.
J’écris.
Avec ma jambe.
Si.
Señores.
J’écris.
Avec ma jambe.
De sa maigreur.
D’atrophie.
C’est elle.
Qui dit.
A ma main.
De faire.
De ses muscles.
A jamais flétris.
C’est elle.
Qui expose.
Ce que ma main.
Raconte.
En une langue.
Mutilée.
De la prétention.
De se vouloir écrivain.
Mais soignée.
Du bonheur.
De seulement.
Faire plaisir.
Sa dysmorphie.
Me encanta.
Car elle dit
La déchirure de l’écriture.
Le tragique magnifique.
Du toreo.
Et le dédain avec lequel
Elle considère.
L’échec.
Des thérapies de tout genre.
Et la bassesse.
Des reseñas de mala leche.
Grace à elle.
Je souris.
A déraper
Sur le glissant du texte.
Et à me raccrocher.
Aux mots.
De la folie.
Des cornes.
Grace à elle.
Je fais attention.
Aux cailloux.
Des cœurs.
De ceux qui.
Se réjouissent.
D’une page.
Ratée.
Ou des trois avis.
Entendus par le novillero hagard.
Grace à elle.
Je comprends mieux.
L’hésitation.
Et la bouche crispée.
Quand il convient.
De dire.
Dans le ruedo.
Ou à sa table de travail
Grace à elle.
Je goûte.
L’orthopédie des mots.
Et l’oreille amputée lancée au public.
Cojo soy.
Et cojo resterai.
Ma jambe.
Me fait avancer
Sans elle.
Je ne parlerai pas.
Sans elle.
Je ne serai rien.
Avec elle.
Je suis.
Ce que.
Je suis.
Sachant cependant.
Que s’il y a.
Des toreros.
Qui finissent boiteux.
Il n’y a pas.
De boiteux.
Qui deviennent.
Toreros !
Cojo soy.
Et cojo resterai.
Patrice Quiot