Aujourd’hui, premier entraînement prévu à la ganadería Sepúlveda, à 30 minutes de notre hôtel, dès 15 heures. Il fait frais, un peu gris, mais un échauffement physique est fixé à 10 heures, pour décrasser les corps. Il faut bien s’habiller, des gants ne sont pas de trop. Un petit footing et puis toreo de salon. Nino est là pour retrouver ses copains et participer à la séance. Simon, qui a passé une semaine à s’entrainer avec le Maestro Tibo Garcia, donne quelques idées d’exercices pour monter l’intensité au fur et à mesure des jours.
 
A ce même moment, belle surprise pour moi de retrouver, sur le pas de la porte, le Maestro Diego Urdiales, toujours aussi sympathique et souriant, avec sa charmante épouse. Nous nous croisons souvent dans les hôtels, pendant la saison, mais aussi dans cette zone de Salamanca où il vient s’entraîner. Il me commente le festival d’hier à Navalcarnero, dans une arène couverte, où il faisait plus froid que dehors ! Visiblement, son novillo n’était pas du tout coopératif, vu sa grimace quand il en parle. Il revient d’une semaine de tentaderos autour de Séville, il est ravi. Après une tienta dans le coin, cet après-midi, il rentre chez lui, sur Arnedo, ce soir. Il a une jolie saison qui se profile, Castellón, Séville, Madrid et surtout plusieurs festivals en début de saison, qui l’aident dans sa préparation.
 
« ¡ Cuídate ! » lui dis-je, quand il s’en va. Les toreros ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour ça …
 
Dans notre hôtel, la clientèle habituelle de la semaine est constituée de travailleurs et de gens qui voyagent sur l’autovía menant vers le Portugal. Mais aujourd’hui, c’est dimanche et ça change du tout au tout, pour une clientèle familiale. Ana, la propriétaire, a eu une excellente idée. Elle a consacré une salle à des jeux d’enfants. Du coup, les familles sont tranquilles, les enfants s’amusent et le commerce des boissons en sort gagnant !
 
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Ce matin, le ciel bleu est parsemé de gros et beaux nuages laissant passer la lumière, pas de vent, les toreros, comme les chats, craignent le vent. Quelques cigognes s’affairent dans leurs nids perchés sur des cheminées ou des pylônes installés à cet effet. Ambiance.
Après la séance de sport, un déjeuner est pris sur place, Ana se soucie de nos goûts et de ce que nous souhaitons manger durant cette semaine, nous sommes bien traités !
14h21 : nous partons en ordre dispersé vers la ganadería de Don Íñigo et Verónica Sepúlveda. Le campo, vite !
14h58 : nous arrivons et les hommes s’affairent sur les toriles. Íñigo a eu la gentillesse de faire un bon feu dans la cheminée, dans le palco dominant le ruedo, ça sent bon le bois de chêne.
 
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15h17 : début du tentadero…
 
1ère vache :
Une rousse, plus qu’excellente, pour Rafaël, Baptiste et Matthieu. Rafaël est très élégant, Baptiste, que je n’avais pas vu depuis longtemps, a fait de grands progrès et Matthieu est un peu brouillon. Le feu crépite derrière moi. Robin donne une bonne série pour prendre confiance. Sacha sort, il est concentré. Simon aussi, ils veulent faire les choses bien. Manuel n’y est pas, ça va venir plus tard.
Cette excellente vache permet un entraînement très précis. Elle boit littéralement la muleta et a pris une centaine de passes sans montrer de signe de faiblesse. Ça commence très fort !
Puis, pour terminer, comme à l’accoutumée dans cette maison, on doit attraper la vache, lui couper le bout des poils de la queue pour savoir qu’elle a été tientée. Elle sort fièrement.
 
2ème vache :
 
Pour Gauthier, Valentin et Clément, cette vache est un peu moins suave, mais très intéressante. Rafaël effectue plusieurs séries de 5 à 6 passes, la vache est hypnotisée par la muleta, lui profite pour rester dans les cornes et avoir des sensations. C’est exactement ce qu’attend de lui le maestro.
Clovis réalise plusieurs séries très « quieto », Nino commente « ¡ eso es !c’est une question de rythme ! ».
Au bout de 30 bonnes minutes, petite séance de coiffure et hop, on la lâche dans le clos voisin.
Simon, qui commence à avoir froid, va récupérer son manteau couleur « dulce de leche ». On le moque en le désignant l’élève le plus élégant de la tarde, mais pas sûr qu’il ait vraiment pu se réchauffer.
 
3ème vache :
 
Le ganadero souhaite que la vache soit vue durant 2 tours, seule, sans sollicitations. Elle est un peu plus violente, mais très bonne. C’est au tour de Manuel, Matthieu et Simon. Sacha prend la muleta, il s’en sort bien. Baptiste est excellent, sachant se replacer : « C’est toi qui décides quand tu donnes le toque ! » dit le Maestro Le Sur.
Au loin, les bien peignées se rapprochent aux bruits qui s’échappent de l’arène.
Pour chacun, c’est une question de gestion de nombreux paramètres dont la distance, le positionnement du corps, son croisement et une donnée importante qu’est le rythme, tout ça dans des conditions de stress plus ou moins important. Rien n’est simple et à tout moment, l’animal peut réagir de façon dangereuse.
Matthieu revient, il s’en sort très bien, tente des gestes persos, c’est super.
C’est une séance sur mesure où chacun peut toréer vraiment longtemps pour essayer des choses, corriger, améliorer, éprouver des sensations de distance etc…
Clément se régale, il a le bon sitio, le bon rythme.
Les deux vaches bien coiffées éprouvent toujours un grand intérêt pour les bruits qui proviennent de la petite arène. De plus, elles semblent inséparables, comme si leur expérience commune avec les humains les rapprochait.
Séance de coiffure, frange et hop les 3 se regroupent dans le champ voisin.
 
4ème vache :
 
16h58 : petite rousse rapide et vive.
 
Pour Valentin, les capotazos sont sans temple, c’est difficile pour lui, aujourd’hui. Sacha est très appliqué. Clovis a de bons gestes. Valentin revient, c’est beaucoup mieux. Robin nous fait des afaroladas, sous les encouragements de ses camarades. Valentin prend la muleta et réalise une série de passes dont nous nous régalons. Tous les bons conseils du coach Joselito sont mis en application, tout au long de l’entraînement.
Gauthier, qui prend lui aussi la muleta, procède par fentes et transferts de poids sur l’autre jambe, en rond, à genoux… suerte inventée par le Maestro Enrique Ponce.
La vache est très noble. Verónica, la ganadera, est ravie. Elle a bien raison.
 
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Nino, pour le plaisir, sort enfin, à la demande du maestro, il nous régale avec sa grande maturité, un toreo très doux, plus maîtrisé, moins dans le combat. C’est très agréable, il faut néanmoins rester vigilant car la vache tente des coups de tête qu’il faut canaliser.
 
Pour Rafaël, des passes en redondo et des desplantes pour être sur les cornes.
Séance de coiffeur. 17h25 : Au bruit de l’ouverture du portail métallique, les consœurs accourent.
 
5ème vache :
 
17h29.
 
Une petite avec une robe caramel foncé, assez haute.
Clément a un bon rythme. Clovis. Puis Manuel, qui a tricoté un peu, puis qui se met en colère et là, il met une paire de séries très affirmées, qui ont du poids.
« Allez ! tu es méchant, mets-toi en colère, impose-toi ! » dit le Maestro Le Sur.
 
 Superbe soleil d’hiver chaud et réparateur.
 
Baptiste est très efficace, mais doit se croiser plus. Clovis, muleta morte avec la jambe pivot. « Ne fous pas le camp, reste dans la vache« . Il le fait et reste quieto, puis tente une passe improbable, ça ne passera pas, rouler-bouler puis desplante à genoux.
 
La vache est infatigable et répond à toutes les sollicitations.
 
17h55 : la vache est déjà très toréée, elle cherche à donner des coups vers les toreros, elle leur fait des fusées.
 
17h58 : chacun doit aller attraper la vache pour la coupe aux ciseaux.
 
17h59 : fin du premier tentadero sous un soleil éclatant.
 
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Notre retour s’effectue sous une lumière rasante, qui révèle la mosaïque des champs : terre rouge profond et champs déjà semés d’un vert intense, c’est très beau ! 
 
Tous les élèves sont fatigués au retour. Le Maestro Le Sur fait un rapide point avec eux, il juge qu’à part Rafaël, tous les autres furent en dessous du bétail. Il va leur falloir montrer leur envie. A bon entendeur…Demain sera un autre jour…
 
Chanquette