PATRICE
Ils s’étaient rencontrés.
Un dimanche de Pentecôte.
Magali faisait la majorette.
Et Marcel lui avait souri.
Ils s’étaient mariés.
Trois mois après.
Marcel et Magali.
Chérissaient le dimanche de Pentecôte.
Ils étaient convenus.
Que ce serait leur jour.
Leur jour.
A eux.
Que tous les deux.
Voulaient exceptionnel.
Ce dimanche-là.
Comme chaque fois.
Le matin pendant que Magali se faisait belle.
Marcel allait acheter des fougassettes.
Et puis.
Ils sortaient.
Prenaient la navette.
Au bas de leur HLM.
Pour aller en ville.
Où à l’ombre du soleil qui accélérait sa course.
Ils se promenaient
Main dans la main sous les micocouliers.
Ils étaient.
Heureux ainsi.
Deux mois avant.
Marcel avait acheté les entradas.
Des tendidos.
De sol y sombra.
L’année d’avant.
Aux tribunes société.
Magali avait eu.
Le soleil dans les yeux.
Son maquillage.
Avait coulé.
Laissant des traces noires.
Sur ses joues.
Coiffée.
D’un chapeau de paille.
Des gouttes de sueur.
Frisottaient sa nuque.
Jamais Marcel.
Ne l’avait trouvée aussi jolie.
Mais Magali avait eu un peu honte.
De se voir ainsi.
Et Marcel s’était promis.
Que ça n’arriverait plus.
Il voulait que pour Magali.
Tout soit parfait.
Bien sûr.
C’était beaucoup plus cher.
Mais Marcel.
N’avait pas hésité.
La courroie de distribution.
De la voiture attendrait.
Et le retard de loyer.
Aussi.
Marcel aimait Magali.
Et Magali aimait Marcel.
Elle avait noué à son cou.
Le foulard qu’il lui avait acheté.
Un vent léger.
Soulevait ses cheveux.
Marcel se disait.
Qu’il aimerait l’emmener en Espagne.
Sur des plages.
Où elle ramasserait des étoiles de mer.
Ils n’étaient jamais.
Partis en vacances.
Elle ne connaissait pas les toros.
Et lui moins encore.
Mais une fois par an.
Le dimanche de Pentecôte.
Magali et Marcel.
Allaient aux arènes.
C’était.
Leur Noël.
De fin de printemps.
De presque début d’été.
Avant ils prenaient l’apéritif.
Elle un verre de rosé.
Et Marcel.
Une bière, quelquefois deux.
Ils déjeunaient.
D’une paella sur la table en tréteaux.
De « L’espagnol » comme ils l’appelaient.
Où ils avaient leurs habitudes.
Magali donnait.
Des grains de riz aux pigeons.
Et Marcel la regardait.
Faire.
Lui caressant.
Le bras.
Ils rejoignaient leurs places.
Une heure avant le paseo.
Et s’émerveillaient.
De tout.
Des couleurs.
Des messieurs et des belles dames.
Si élégants.
Au premier rang des premières.
Ils applaudissaient.
La sortie des toros.
Et les belles passes.
Des toréadors.
Ensemble.
Ils criaient olé.
Et tapaient des mains.
Quand jouait la musique.
Marcel lui offrait.
Des pralines.
Et Magali lui disait.
« Merci mon chéri ».
Elle.
Fermait les yeux au moment de l’estocade.
En se blottissant.
Contre sa poitrine.
Quand la « mise à mort » comme elle disait.
Était terminée.
Ils rentraient.
A pied.
En se partageant.
Une petite bouteille d’«Orangina».
Marcel montrait à Magali.
L’étoile du Berger.
En faisant attention.
Qu’elle ne se torde pas les pieds.
Sur les cailloux.
Le long des ponts de Talabot.
Quand Magali avait un peu froid.
Marcel lui mettait sa veste sur les épaules.
Le lendemain.
Il poserait la nouvelle tapisserie du salon.
Et Magali.
Ferait la lessive.
Patrice Quiot