MUGRON
Arènes combles, nuages et soleil, température fraîche, deux heures quarante-cinq de spectacle. Six toros de Baltasar Ibán, remarquablement présentés, sans excès de cornes, lourd et très mobiles. Tous deux piques, le quatrième trois châtiments.
Sergio Rodríguez (bleu ciel et or) : au premier, trois pinchazos, un descabello, silence ; au quatrième, une entière, silence.
Marcos Linares (blanc et or) : au premier, deux entières, avis, silence ; au cinquième, une entière, une oreille.
Tristan Barroso (rose vif et or) : au premier, une entière, une avis, une oreille ; au dernier, deux entières, un pinchazo, avis, silence.
Présidence : Colette Lacome.
Des courses comme celle de Mugron, en ce dernier lundi de Pâques, l’aficionado s’en souvient une fois de temps à autres. Dans l’arène de Condrette, depuis une célèbre course de Juan Pedro Domecq, on avait rarement vu un lot avec autant de présence, de fougue et de bravoure au cheval. Des Baltasar Ibán qui ne tarderont pas à entrer dans la légende. Tous deux piques, avec des moments de mettre en difficulté la cavalerie, le quatrième qui avec trois châtiments renverse le picador, on s’approche des corridas à l’ancienne. Il est vrai que la ganadería qui vit à l’ombre du « Valle de los Caídos » est arrivée avec une étiquette de trois ans, mais des formes et des comportements de toros de quatre ans.
Dans ces conditions, les novilleros se sont trouvés un peu à l’abandon. Tout particulièrement Sergio Rodríguez, qui après un premier bon tercio de cape se trouve rapidement débordé à la muleta. Jamais il ne pourra renverser la situation. En outre, tuant mal, il demeurera anonyme dans cette première sortie. Il sera un peu plus séduisant lors de sa seconde apparition. On le voit prendre confiance, mais jamais ne s’imposera avec une faena très laborieuse.
Marcos Linares, malgré un premier tercio de cape plutôt bien fait, sera pratiquement inexistant par la suite. Jamais il ne trouvera le sitio et ne parviendra à la moindre maîtrise. Par contre, il apparaît métamorphosé pour son retour et l’on retrouve un novillero sûr de lui qui maîtrise parfaitement la muleta. Il impressionne dans sa série de muletazos d’ouverture. Il est bien et courageux.
Tristan Barroso qui avait triomphé ici en NSP revenait avec une lourde charge mentale. Son aisance à la cape débordait sur la muleta. Ses muletazos de début, servait aussi à faire humilier le toro et à le dominer. Il dessina une série de naturelles à faire rêver devant tant de facilité. Quelque trincheras pour ponctuer l’ensemble et Tristan Barroso en termina d’un entière… La première oreille de la course. Il ne retrouva pas cette facilité avec le dernier, un dur à cuire qui tortura le picador… Mais dans cette lutte de brave avec l’homme qui sortait sous les applaudissements du public, « Latinoso » laissa beaucoup de force qui manquèrent pour faire briller la faena.
Il y avait de bons novilleros, mais surtout un grand lot de toro avec plusieurs applaudis à l’arrastre, un quatrième qui renverse le cheval et un dernier qui le promène selon ses envies. Le toro était le prince de l’arène.
Jean-Michel Dussol
Merci à Bertrand Caritey et Roland Costedoat, deux grands photographes du monde taurin pour leur fidélité.
Matin :
Mais qui va payer la chaise ?
Avec trois novillos sans picadors d’Alma Serena se sont ouvertes les Pâques taurines de Mugron. D’un côté, Andoni Verdejo avec derrière lui de multiples courses, avec pour challenger, Hadrien Lucq qui faisait sa première course en public. Un Hadrien Lucq qui avait bien décidé de ne pas s’en laisser conter par un ancien et qui à la surprise générale nous joua la partition Paco Alcalde en faisant installer une chaise au milieu du ruedo. “Quand j’ai vu cette chaise dans le callejón, j’ai pensé que mon fils avait un malaise, qu’il ne supportait pas la pression de cette première… ” nous confiait à la sortie le père d’Hadrien.
Averti une première fois, le jeune torero poursuivait son pari. Son premier derechazo, serait donné assis, mais le novillo qu’il tenta, au dernier moment, de rediriger dans son dos, percuta l’homme et la chaise qu’il transforma en bois d’allumette. Hadrien subit ensuite la colère du cornu. Puis les choses rentrèrent dans un ordre plus logique. Mais à l’heure où nous écrivons ces lignes, personne ne sait encore qui va payer la chaise. Après quelques instants de doute, Hadrien retrouva toutes ses facultés et nous livra une exquise fin de faena. Des derechazos sans fin, avec une muleta très basse.
Il ne faisait aucun doute que le toro de la finale reviendrait à Andoni Verdejo. Il avait coupé deux oreilles lors de sa première sortie (la seconde peut-être trop généreuse) et dans tous ses gestes une parfaite maîtrise de la technique. Avec le toro de la finale, il donnait un véritable florilège de son grand savoir. On retiendra plusieurs séries à droite, pieds rivés dans le sable et un final où après avoir jeté l‘épée la muleta virevolte de main en main. Il termine d’une entière, empoche là, deux oreilles très méritées et sort en triomphe. Andoni a les moyens de faire son retour en novillada formelle.
Jean Michel Dussol
(Corridasi)