MAXIME
Immersion dans le quotidien d’un torero banderillero
« Les clopes, les stations-service, le café, la route, la nuit, le toro qui a fait ci, qui a fait ça, le fumet de la corrida passée qui a du mal à s’évaporer : voilà, un texte, des textes, qui balancent un peu de flashes lumineux sur ce monde obscur, clos sur lui-même, sur ce quotidien si peu doué pour le quotidien, si peu fait pour les affaires courantes, les nôtres… Ce témoignage subjectif, volontairement « perso », plus allusif que documentaire, c’est celui de Maxime Ducasse, torero. Cette immersion dans cet univers, sauf erreur de ma part, on n’en connaît pas d’autres exemples », Jacques Durand, écrivain et journaliste.
À la fin de chacune de ses saisons taurines, vingt-sept au total, Maxime Ducasse, banderillero, écrit quelques pages sur l’année écoulée. Une vision intime de ce qui lui en restait, qu’il se gardait bien de faire lire à quiconque, si ce n’est son ami, l’écrivain Jacques Durand. Ces notes, intimes et sensibles ont été réunies ici. Un récit unique.
Sortie le 18 mai 2023 – 304 pages – 22 €
Biographie
Né en 1964, Maxime Ducasse est un banderillero nîmois. Il a exercé son métier de banderillero durant trente ans auprès de grands toreros français et espagnols.
Maxime dédicacera son livre à la librairie Teissier de Nîmes le samedi 27 mai à partir de 15h…
Ci-dessous, communication de Daniel Jean Valade, adjoint au maire de Nîmes…
Entrons dans la Cour des Grands avec Maxime Ducasse…
L’univers littéraire connait, en France, deux “rentrées” : à l’automne et au début de l’année. Nîmes est notable pour un troisième “tercio” : la Féria de Pentecôte où sortent les ouvrages d’inspiration tauromachique. 2023 sera notable par la parution du texte que Maxime Ducasse a peaufiné au cours de ses trente années d’activité dans les arènes. « Au diable vauvert » les publie. Chacun se doit de suivre le torero et l’homme dans ce paseo de vérité
Jacques Durand, auquel on doit la permanence de son superbe talent d’écriture, a préfacé l’ouvrage. Il y évoque finement les liens forts qui l’unissent à Maxime, narrant la parabole du bocal d’anchois élevée au rang de morale universelle !
Au commencement s’impose l’emblématique piste des arènes de Nîmes, photographiée depuis les hauts gradins, face au toril. Argent du sable. Frontière carmin (carmen !) des barricades, ouroboros du destin, toutefois interrompu par les portes, ici closes, qui disent le possible salut. Burladeros blêmes, internes au callejon. Œil d’un cyclope ? Visage à la Jérôme Bosch ? Image archétypale de cet espace terrible et sacré où, durant trois décennies, Maxime Ducasse a toréé dans un dialogue avec la beauté et la puissance du toro. De poder a poder. De puissance à puissance, si infinitésimal instant dans le berceau, si mal nommé, tant il peut rimer avec tombeau.
Par chance pour nous, il publie près de 300 pages auxquelles il a confié son chemin de vie, ses pensées, ses moments heureux et ses doutes, au fil des temporadas. Ce beau texte n’est pas un journal, même s’il est précis comme l’almanach d’une carrière dont nous lui sommes redevables d’avoir, annuellement, noté les actes. Il est plutôt un Livre de Raison tel que le créa Montaigne ou comme ces recueils fondamentaux où les camisards consignaient leur vie. D’ailleurs, Maxime n’est-il pas huguenot ? L’un des rares, sans doute, à fouler le sol des arènes.
On se souviendra toutefois, qu’à l’heure de la Réforme, même le cardinal-archevêque de Séville devint un (court) temps protestant avant d’être descabellé par la totalitaire Inquisition !
Maxime nous fait partager les saisons de sa vie. Les aficionados apprendront les succès et les doutes au cœur de l’existence d’un torero. Nous tous lirons les confidences d’un homme de passion qui, avec une bienfaisante distance (toujours évaluer les terrains tant techniques qu’intellectuels, en piste et au quotidien) regarde et analyse les composantes du « chiffre de nos jours », avant de s’élancer éperdument. M. Ducasse nous invite dans les coulisses d’un art où la rigueur permet la création de beauté. A l’instar d’une faena, son texte, toujours très précis quant aux faits et aux pensées, prend une ampleur à laquelle nous sommes sensibles et qui peut avoir pour nom “temple”, cette maîtrise de soi, du geste et de la charge du fauve d’où naissent une autre dimension de l’espace-temps. Le torero nous embarque dans une faena d’une vraie esthétique. Elle nous prouve son subtil art d’écrire.
Les « confréries » des métiers taurins nous ouvrent des perspectives nouvelles de réflexion. La narration des corridas de « despedida » (d’adieu aux armes) nous fait pénétrer au cœur des âmes. M. Ducasse a toujours analysé les lieux qui l’attendaient, et qu’il attendait (ah ! la perception redoutable de cette première course de l’année !) Ainsi, « regardeur » tel que le définissait Marcel Duchamp, regarde-t-il lui-même le public à l’heure de « l’hypnose collective », tous les yeux dans une arène rivés sur la porte d’où jaillira le fauve cornu. L’Espagne lui offre les composantes du « Foro », ce forum où, à Madrid, se situent les espaces du monde taurin et qui est un univers en soi. Ami de la nuit, Maxime réfléchit sur « Superstition et religion » tout comme il nous fait partager sa réflexion sur le thème du costume de lumière, entre café et cigarette, mano a mano rituel.
Deux points illustrent à nos yeux la personnalité du torero M. D. Tout d’abord dans les dialogues qui émaillent et vivifient son texte, ce « Merci », mot premier et primordial qu’il adresse sans faille aux toreros qui lui offrent de les rejoindre, preuve simple mais si fondamentale de reconnaissance fraternelle, nous met dans la confidence. Dans le même ordre d’idée, cette expression plusieurs fois présente : « enfant gâté ». Il ne le fut nullement, ne devant cette impression qu’à son courage et son talent d’homme volontaire, assidu et fidèle.
On lira par ailleurs sa connaissance affinée des réalités chiffrées du monde de la corrida et sa référence suprême qui, outre-Atlantique, incarne la puissance symbolique taurine, comme le fut à Rome la louve.
Maxime Ducasse, c’est aussi, en écriture comme dans l’arène, un style. Simple, fort, non exempt d’ironie. Soyons reconnaissants à ce torero qui aurait sa place au Siècle des Lumières au temps des Ilustrados. Et réjouissons-nous qu’après avoir si parfaitement tenu les banderilles, il ait pris, avec autant de pugnacité et de sincérité, la plume.
DJV