PATRICE
« En 1616, le parlement de Bordeaux interdit la corrida. Un décret de Louis XIII l’interdit en 1620.
L’évêque d’Aire (Landes), Gilles Boutault, promulgue une ordonnance épiscopale interdisant la corrida qui n’est pas respectée et qu’il relance en 1647, avec l’appui de Louis XIV.
Au XVIIe siècle, c’est l’apogée du combat équestre. Les cavaliers (rejoneadores) emploient le rejón et vont, au galop, au-devant du taureau au lieu de l’attendre.
En 1643, un ecclésiastique, Don Gregorio de Tapia y Salcedo, publie le Traité d’équitation et diverses règles pour toréer, codifiant la tauromachie à cheval réservée à la noblesse.
Puis, avec le temps, les toreros à pied, qui aident les cavaliers à positionner le taureau grâce à leur travail de cape, prennent une importance croissante aux yeux du public, et la corrida commence à prendre sa forme moderne.
A la fin du XVIIe siècle, la mise à mort des taureaux pendant les courses (touradas) n’est plus admise au Portugal.
Le 17 janvier 1701, les échevins de la ville de Bayonne organisent, en l’honneur de Philippe V d’Espagne, la première corrida en France.
Au début du XVIIIe siècle, la noblesse espagnole abandonne l’arène pour plaire à Philippe V (1700-1724), formé à Versailles, lequel, détestant les corridas, encourage à ce qu’elles ne soient plus pratiquées par la noblesse ; les toreros à pied jouent alors un rôle important (surtout en Aragon et Navarre).
On attribue à Francisco Romero, un charpentier de Ronda, bourgade andalouse, l’invention, vers 1725, de la tauromachie moderne où le combattant ne dispose, pour affronter le taureau, que de l’épée et de la muleta.
De 1730 à 1750, la corrida se codifie, faisant apparaître les trois tercios et surtout les passes à l’aide de la muleta.
Très tôt, les Espagnols exportent l’art tauromachique en Amérique latine, surtout au Mexique.
Dans son « Voyage dans l’intérieur de l’Amérique méridionale » publié en 1778, La Condamine relate la course de taureaux à laquelle il fut invité à Cuenca (Pérou) : « Sorte de fête autrefois à la mode en Espagne et dont le goût s’est conservé dans les colonies espagnoles de l’Amérique ».
En 1757, Bayonne est la première municipalité française à comprendre la nécessité de clôturer la corrida dans des enceintes, préfigurant les arènes que nous connaissons aujourd’hui
A la fin du XVIIIe siècle, les règles de la tauromachie sont à peu près celles que nous connaissons, celles d’une véritable pièce de théâtre (le Code des corridas définitif date de 1852).
La première course à la cocarde officiellement homologuée eut lieu le 20 mai 1805, à Arles, à l’occasion de l’inauguration de l’obélisque antique, place du Marché, face à l’hôtel de ville.
La Loi du 2 juillet 1850, dite Loi Gramont (Jacques-Philippe Delmas, duc de), condamne les personnes ayant fait subir publiquement des mauvais traitements aux animaux. Au début du XXe siècle, la Cour de cassation juge qu’elle s’applique aux corridas, mais elles continueront d’exister malgré la loi.
Le 21 août 1853, Saint-Esprit-lès-Bayonne organise la première corrida à l’espagnole en France, pour satisfaire la passion d’Eugénie de Montijo, l’épouse de Napoléon III.
« L‘auteur de cette loi de protection des animaux, le duc de Gramont, ministre de Napoléon III, n’hésitait pas à présider les premières corridas de Bayonne aux côtés de l’impératrice Eugénie de Montijo. »
En 1863, sur le conseil du Pape Pie IX, Mgr Plantier, évêque de Nîmes, adresse une longue lettre à ses diocésains dans laquelle il décrit avec indignation le spectacle de l’arène : « Quand on nous raconte le détail de ces hideux combats […] nous croyons entendre un récit des temps païens […] Ces jeux ne sont attrayants que par le côté du péril et de la souffrance. Ce sont surtout les inquiétudes ou les douleurs du taureau qui vous passionnent ; et certes, quoi qu’on en puisse dire, ce genre de satisfaction n’est pas chrétien. L’esprit de douceur et de mansuétude fait essentiellement le fond de l’évangile […] Du Maître, cette vertu doit passer aux disciples ; et telle en est la tendresse, telle en est l’étendue, dans les pensées de Celui qui l’a commandée, qu’elle doit s’interdire non seulement de torturer, mais même de froisser, mais même d’inquiéter un être quelconque pour se faire un divertissement de ses détresses. Barbare vis-à-vis des animaux [ce spectacle], qu’est-il vis-à-vis de l’homme qui lutte contre eux ? Il est au moins dangereux quand il n’est pas meurtrier […] Et l’on oserait dire après cela que des chrétiens peuvent assister à de pareilles scènes ? […] Ainsi du côté du spectacle rien n’est digne du chrétien parce que tout est frivole ou barbare. »
Pie IX estime par ailleurs que les animaux n’ont pas d’âme. »
A suivre…
Patrice Quiot