PATRICE
Au Nord, au Sud
Et à l’Est, des pins.
Hauts, fins.
Vert sombre ils sont.
Rien.
D’autre.
Des pins.
Partout.
Elégants.
Dans leur sobriété.
Des «El Viti».
Du végétal.
Alignés verticaux.
Comme des hoplites sans armes.
Qui garderaient.
Le souffle du silence.
Sous l’œil.
De ces sentinelles à feuilles en aiguilles.
Dans les bonds désordonnés.
De chevreuils roux.
La route droite et déserte.
Ne finit pas d’en finir.
Un paseo.
A la perpétuité d’Alcatraz.
Elle mène.
A l’Ouest.
Vers la Gironde de Margaux.
Et l’Océan de l’immensité.
Et traverse des pueblos.
Aux noms qui sonnent aux clochers des églises.
Sanguinet, Gastes, Eulalie-en-Born, Pontenx-les-Forges,
Saint-Paul-en-Born, Aureilhan.
Bias, Mézos, Saint-Julien-en-Born.
Uza. Lévignacq.
Douceur languissante.
D’un pays figé.
Dans une immobilité.
De barthes et saligues.
Mais, là, un dimanche à midi.
Entre Labrit et Labouheyre.
Sous un soleil.
Qui donnait vie au bleu du ciel.
On sentait dans la terre où ils s’enfoncent.
Des vibrations telluriques.
Qui font qu’on appréhende.
De s’y égarer la nuit.
C’était le pays.
Des Bituriges Vivisques.
Venus en Aquitaine.
Après la conquête par César en -56.
On raconte qu’ils étaient.
D’une férocité inouïe.
Plus tard, quand le pétrole y était exploité.
Derricks et pompes à balancier.
Devaient donner au Born.
Un petit air de far-West landais.
De l’extérieur.
Les arènes Roland Portalier.
Ressemblent.
A une soucoupe volante.
De l’intérieur.
A une placita pimpante.
Où on aime.
S’y retrouver après avoir déjeuné de palombes.
Poète, Tourmente, Petit Gris.
Sable, Vainqueur et Tempête.
S’appelaient les six.
De « Pedrés».
Domecq et Aldeanueva.
Pour l’origine.
D’Espera, près de Salamanque.
Ils venaient.
Un pays où les pins.
Deviennent chênes liège.
Et les pinsons.
Oies rieuses.
Gros.
Et armés ils étaient.
Plus toros.
Que novillos.
Faibles et sosos.
Sans race, ils vinrent.
Sans jus.
Sans sève odorante.
Comme des cancres.
Ils se comportèrent.
Pour les réduire.
Plus que les trastos toreros.
Il eut fallu.
La cognée bûcheronne.
Garcia Pulido a dans les yeux.
Quelque chose de Morante.
Il toréa en fin technicien.
De merlin et de coin.
Lalo de María est torero.
De forme et de fond.
A Parentis.
Il le fut en quelques detalles.
Comme autant.
De copeaux de plaisir.
De dentelles.
Et glycines en guirlande.
Et Ismael Martín.
A l’envie désordonnée de l’impétuosité.
Toréa en fendeur de bois.
Dans des effluves de résine.
Avec lui se termina.
Un beau week-end de toros.
De grâce.
Et d’amitié
Et en sortant des arènes.
J’avais au cœur comme une entaille profonde.
Le soir sur la terrasse de l’hôtel où je descendais.
Me revint en mémoire.
Un lance antiguo.
De Théophile Gautier.
« On ne voit en passant par les Landes désertes.
Vrai Sahara français, poudré de sable blanc.
Surgir de l’herbe sèche et des flaques d’eaux vertes.
D’autre arbre que le pin avec sa plaie au flanc.»
Le lendemain sur la route du retour, entre Lhipostey et Pissos.
Je retrouvai les pins de Parentis.
Datos
Dimanche 6 août 2023/ Arènes de Parentis, seconde novillada des Fêtes 2023.
Six toros de Pedrés.
Quasi lleno.
Guillermo Garcia Pulido: Oreille, silence (avis).
Lalo de María: Silence (avis), silence (avis).
Ismael Martín: Oreille, oreille.
Patrice Quiot