Dans ma jeunesse, Ángel Teruel faisait partie des toreros que l’on admirait dans l’amphithéâtre, à l’époque où il partageait les affiches avec les principales figuras comme les Palomo Linares, Paquirri, Niño de la Capea, Luis Francisco Esplá… En outre, on n’oublie pas à Nîmes qu’il est venu y donner l’alternative à Simon Casas puis Nimeño II, ce qui a certainement compté chez les responsables dans l’invitation qui lui a été lancée de venir parrainer le week-end dernier cette édition du Rendez-Vous…
Samedi dernier, après avoir inauguré la veille ce « Rendez-Vous en Terre d’Aficion », le maestro était invité à intervenir selon la formule d’une « carte blanche », à savoir une espèce de discussion/dialogue à bâtons rompus, Teruel, entouré de Frédéric Pastor et André Viard dans le rôle d’animateurs et d’interprètes, revenant notamment sur sa vocation de torero, sa trajectoire, la France Taurine et ses impressions sur la tauromachie d’hier et d’aujourd’hui…
La séance a été introduite par Frédéric Pastor, Adjoint à la Tauromachie, qui a rappelé une phrase d’Antonio Bienvenida concernant Ángel Teruel : « Il commence par là où les figuras finissent ! », une appréciation qui non seulement évoquait sa technique, mais aussi sa remarquable élégance…
« Je suis né dans un quartier de Madrid, calle Ferraz, où mon père tenait un manège et où vivaient plusieurs toreros. C’est là où très tôt j’ai été empreint de l’ambiance taurine…
J’ai pris l’alternative à 17 ans. J’avais toréé à peine 18 novilladas non piquées et 19 piquées, avec seulement huit ou neuf toros en privé !
Le toreo, c’est avant tout une technique, et ensuite, vient l’Art que chaque torero peut interpréter devant le toro. Mais il est indiscutable que pour dominer un toro, ce qui compte avant tout, c’est la technique ! Si tu ne parviens pas à dominer le toro, ce que tu fais reste superficiel !
Pour parvenir au somment, il fallait s’entrainer durement, physiquement, bien sûr, mais aussi dans les tentaderos, pour travailler le sitio. Les temporadas étaient plus compactes et de novembre à mars, je partais en Amérique, ce qui fait qu’il n’y avait pratiquement pas de coupure car on revenait pour Castellón et Valencia…
Depuis que je suis retiré, je n’ai pas cessé d’être en contact avec le monde des toros. Et malheureusement, au XXIe siècle, ils veulent en finir en Espagne avec une tradition si fondamentale qui est la Fiesta de los Toros…
Je suis très heureux de me retrouver dans votre ville où j’ai partagé toutes sortes de sensations, les unes très satisfaisantes, et d’autres qui m’ont fait passer des moments de grande angoisse, mais toujours avec un grand respect pour le public français, et en l’occurrence envers celui de Nîmes !
Quand j’ai commencé à toréer, la France Taurine n’était pas tant avancée, compétente, que maintenant bien que peu à peu, les aficionados français sont venus très nombreux en Espagne. Mais j’ai beaucoup apprécié l’aficion nîmoise qui a su garder sa catégorie au fil des époques…
Avec les deux graves blessures subies en fin de carrière, je pense que ça n’a pas été la meilleure manière de me retirer ! Mais je pense que c’est notre destin et qu’une retirada après avoir été matador de toros pendant vingt ans, c’est une victoire ! Je rends grâce à Dieu pour ce qu’il m’a donné dans ma vie…
J’ai notamment eu la chance de toréer avec Rafael Ortega dans les dernières années de sa carrière, avec Litri, Aparicio, Camino, Puerta, Paquirri, Palomo, Dámaso, et plus tard, Manzanares, Capea… Tous figuras, comme Antonio Ordóñez avec qui j’ai eu la chance de toréer une trentaine de corridas, c’était un torero d’une dimension hors du commun et comme compañero, il avait quand-même quelques chats dans l’estomac ! C’est-à-dire que la competencia était forte et que s’il y avait du respect, la rivalité était très forte dans le ruedo.
Actuellement, la tauromachie a changé, essentiellement dans le domaine de la communication, mais en même temps, elle a quelque peu perdu de son caractère. Avant, surtout quand on restait longtemps en Amérique, on vivait carrément ensemble et en il y avait un sorte de solidarité. J’ai eu la chance d’avoir à un moment pendant trois ans le même apoderado que lui et que Paco Camino, Manolo Chopera, on l’a soutenu dans ses premier moments, et malheureusement, il y a eu plus tard cet accident (La veille, lors de sa rencontre avec Alain Montcouquiol, alors qu’ils ne s’était plus revus depuis une trentaine d’années, avait été empreinte d’une forte émotion, tant de choses refaisant surface)…
Le jour de son alternative, lors de la remise des trastos, je lui ai souhaité d’avoir la même chance que moi et qu’il puisse partager beaucoup de triomphes avec moi pendant très longtemps ! (Frédéric Pastor précisa alors que lorsqu’il avait pris contact avec le maestro, à l’évocation de Christian, il lui avait dit : « Pour moi, ce n’était pas un compañero, il était comme mon fils ! »)
Concernant Simon Casas, son alternative avait signifié aussi sa despedida, il n’avait pas eu de chance ce jour-là je luis avais dit des paroles dans le genre de celles qui l’on prononce en cette circonstance, justement en lui souhaitant… bonne chance !!!
Dans le domaine des encastes, les toros que j’ai le plus aimé toréer ont étét incontestablement les Buendía !
Le pire souvenir de ma carrière, ça a été le fait de m’arrêter de toréer ! Et le meilleur, ça a été tous les bons moments que j’ai pu passer après une corrida !!!
Oui, retourner dans les ruedos, j’y ai bien sûr pensé, mais à ce moment-là, j’ai été victime d’un très grave accident de la circulation et les choses sont restées en l’état ! »
Voilà en vrac les propos, ou du moins une bonne partie, tenus par le Maestro au cours de cette émouvante et sympathique rencontre qui aurait mérité un auditoire encore plus important car ce n’est pas tous les jours qu’une telle pointure revient sur le théâtre de ses exploits. Avec aussi l’évocation de ses premiers pas taurins, ce ses quatre apoderados, de son morceau de musique favori, « Carmen », ou encore en ces temps d’exposition Picasso à Nîmes, de son amitié avec son épouse Jacqueline et aussi Lucien Clergue.
Une bonne occasion pour certains, dont je fais partie, de l’avoir revu après l’avoir vu à l’œuvre dans les années 60. Une figura, une vraie, avec autant d’humilité que d’élégance. Deux heures qui ont ravivé la nostalgie… Avec ce qui ne l’a jamais quitté, la Classe !
CASAS
Sur le site Mundotoro.com, entrevista de Simon Casas à l’occasion de l’ouverture de la Feria de San Isidro. Au fil des questions, le directeur des arènes de Las Ventas s’exprime sur la confection des cartels de San Isidro, le choix des toreros, la proportion d’engagements des figuras, le contenu du cahier des charges et les limites des secteurs d’exploitation, le comportement des politiciens et des décideurs du mundillo, l’union des principaux protagonistes, le rôle du ministère de la Culture, les retransmissions télévisées, la baisse de l’IVA, l’impact tarifaire, les novilladas, la culture et les valeurs de la Fiesta, la mort du toro, les « animalistes », et pour conclure, ce qui est le plus important dans sa vie…
Lire cette entrevista en cliquant ICI
MADRID
Ouverture de la Feria de San Isidro devant trois quarts d’arène et face à des novillos de Guadaira charpentés, mais donnant peu de jeu la plupart, l’affaire se soldant par six silences…
David Garzón
Carlos Ochoa
Ángel Téllez
(Photos : Joël Buravand – Album : ICI)
GIMEAUX
Gimeaux sous le soleil
Les pluies ont épargné la Monumental de Gimeaux qui a connu un nouveau succès populaire pour cette fiesta campera commémorant les 30 ans de l’Ecole Taurine d’Arles. Deux oreilles pour les toreros, mais les deux dernières paires attribuées sont moins significatives à cause surtout du bétail.
Ont été combattus, dans l’ordre, un novillo de François André N°543, honoré d’une vuelta posthume, par Paquito Leal, un Malaga (Callet) par Tibo Garcia, un Pagès-Mailhan par Mehdi Savalli, un toro d’El Palmeral (Fano) par Marco Leal et un novillo de Piedras Rojas (P. Laugier) par Vincent Perez.
(Communiqué – Texte et photos : T. Ripoll)
CHIRURGIE
Suite à la polémique de ces derniers jours suite à la blessure reçue par le banderillero Víctor Pérez à Saint-Martin-de-Crau et le traitement médical qui a suivi, l’Association Française de Chirurgie Taurine a fait connaitre le communiqué suivant :
« Par la présente, l’Association Française de Chirurgie Taurine souhaite apporter tout son soutien au Docteur Jean Yves Bauchu, dont les qualités et compétences ont récemment été mises en doute par la presse taurine espagnole lors de l’accident survenu au banderillero Víctor Godofredo Pérez Rodríguez dans les arènes de Saint Martin de Crau, le 28 avril 2018.
Lors de cet accident, la prise en charge s’est effectuée en respectant les règles de la chirurgie taurine et à l’aide du matériel chirurgical et d’anesthésie adapté à la traumatologie par cornes de taureau de combat. La blessure n’a pas été ignorée comme la presse a pu l’écrire, elle a été traitée de façon première à l’infirmerie de la plaza de Saint Martin de Crau par le Docteur Bauchu qui a décidé après un premier bilan et un premier traitement sous anesthésie locale, d’un transfert pour une exploration chirurgicale sous anesthésie générale à l’hôpital d’Arles.
Víctor Godofredo Pérez Rodríguez a refusé cette attitude thérapeutique et a préféré regagner Madrid par ses propres moyens afin de consulter le chirurgien de son choix, en pleine connaissance des risques encourus. Il a alors été pris en charge par le Docteur Enrique Crespo Rubio avec succès.
L’Association Française de Chirurgie Taurine déplore une nouvelle fois l’attitude et les propos calomnieux véhiculés à tort par la presse taurine espagnole, qui met en doute la qualité de la prise en charge des toreros blessés en France. Le Docteur Bauchu, chirurgien vasculaire et ancien chirurgien militaire, exerce dans les infirmeries d’arènes du Sud-Est depuis de nombreuses années et de nombreux toreros ont, sans aucune controverse, bénéficié de ses soins dans les infirmeries d’arènes.
La qualité des soins dans les arènes françaises n’est plus à prouver, et de nombreux toreros ont eu la vie sauve grâce à la dextérité et les compétences des chirurgiens français. Cette qualité de prise en charge s’associe à l’action de l’UVTF qui s’est engagée en assemblée générale à apporter plus encore son soutien administratif et logistique aux équipes chirurgicales de garde dans les arènes. Chirurgiens taurins français et espagnols exercent leur art de façon exemplaire et similaire, et afin de prouver leurs bonnes relations, leurs deux sociétés savantes (SECT et AFCT) organiseront leur congrès national de façon commune à Huesca en juin prochain.
L’AFCT souhaite par ailleurs un prompt rétablissement au banderillero Víctor Godofredo Pérez Rodríguez et espère son retour rapide dans les ruedos.
L’AFCT espère par ce communiqué, apaiser les tensions naissantes de part et d’autre de la frontière et rassurer les toreros sur la qualité de leur prise en charge en France. »
En définitive, pour des raisons personnelles et pour couper court à la polémique, le Dr Jean Yves Bauchu a annoncé son intention de cesser ses fonctions dans le cadre taurin…
DARRÉ
FÊTES VOTIVES
Soutenus par l’esprit vif d’un pince-sans-rire, les propos d’Antoine Martin font toujours mouche. Très fin observateur du monde qui l’entoure, qu’il soit taurin, festif ou encore faisant référence au caractère de la société qui l’entoure, Antoine a le souci du détail, du ressenti, qui nous donne à mieux connaitre nos traditions, pour les magnifier comme pour les pourfendre, avec toujours l’arme redoutable de l’humour, voire de la dérision…
Après avoir notamment publié un Abécédaire de la Tauromachie, Le Sapeur Pompée, Fous de Feria, Juin de Culasse ou autres Produits Carnés, mais pas que, Antoine vient de s’attaquer à la manifestation festive qui accapare après un an de préparation toute la vie des villages : la Fête Votive.
Chez nous, ça passe quotidiennement pendant environ une semaine par une programmation quasiment inamovible qui tourne autour du déjeuner au pré, de l’abrivado, la bandido, la course camarguaise, le concours de boules, le baleti et bien sûr le sacro-saint Apéro, que l’on doit d’ailleurs envisager pluriel, avec celui de midi et l’autre, le soir, à la fraiche, qui dure parfois jusqu’à point d’heures…
Tout cela est narré et conjugué sous toutes ses formes, à commencer par celle de la bonne humeur, mais aussi une analyse fine des comportements, exercice ô combien difficile qui nécessite un sens aigu de l’observation qu’il faut traduire par ses propres mots et une foule de sentiments. Avec, bien sûr, le vocabulaire si particulier et si fleuri qui va avec !
Antoine aime la fête, les gens, la musique, les taureaux, les chevaux et l’apéro, aux arènes, dans les ruelles, au comptoir, sous les platanes, avec les couleurs, les sons, les odeurs, bref une ambiance pour laquelle on adhère quand on a encore envie de se laisser porter par nos traditions et ce qui fait de notre vie les petits moments de bonheur qui ajoutés entre eux nous aident à oublier un quotidien souvent moins flamboyant. Bref, après la feria, une sorte d’hommage à la fête votive, celle de nos villages, de notre terroir… et de toutes nos passions.
D’un réalisme aussi pointu qu’irrésistible, avec la particularité d’une lecture dans les deux sens qui comprend un abécédaire ne laissant rien au hasard. Tout, tout, tout, vous saurez tout sur la « Voto »…
Illustration d’Arnaud Fayet.
Album cartonné de 128 pages. Editions Au Diable Vauvert – SEDICOM
GRAVES