Récit par Freddy Porte de la 4ème édition du Chemin de Méjanes…

 

Entre Romería et Pèlerinage, nous voilà réunis pour cette 4eme édition au départ du Bouau d’Aubanel.

Temps frais, mistral raisonnable mais évident, juste ce qu’il faut pour nous préserver des moustiques et autres parasites piqueurs.

Les chevaux sont sensibles à cette fraîcheur et semblent revigorés. Ajouté à cela, l’immensité du paysage fait que certains sont plus excités que d’autres. La lame use le fourreau !

Les marais que certains empruntent sont relativement secs en surface. Nous laissons au gros de la troupe et aux attelages la draille dont le revêtement est moins confortable pour le pied des chevaux.

 

Nous les rejoignons à mi-parcours pour un périple commun jusqu’à la terre promise.

 

Chemin faisant, ponctué de nombreux arrêts, l’occasion de laisser se manifester l’esprit festif, voulu et souhaité…

 

Au son des guitares, Antoine et son groupe animent avec talent ces moments de partage.

En tête de cortège, Christian Dubois et ses frisons emmènent la calèche VIP. Y ont pris place Michèle Ricard, Virginia et quelques proches amis triés sur le volet.

 

François-Xavier préfère chevaucher et se mêler aux cavaliers et cavalières chaque année plus nombreux.

Un seul absent, mais de taille, Paco Ortiz, retenu à Sevilla par des obligations professionnelles.

Il est l’Âme et l’initiateur de cet événement, et il nous a manqué autant que nous lui avons manqués. Il nous le confiera le soir même au téléphone.

 

Le martèlement des sabots, rythme et cadence notre avancée.

Le mangio-fango caresse nos visages et couche la végétation. Roseaux et tamaris se plient sous son souffle, alors que frissonnent et ondulent les salicornes…

La lumière est vive, le Vaccarès plus bleu que gris, frôle l’horizon et s’y confond.

Telles quelques traces çà et là, certains cavaliers, s’écartent du groupe et jouent l’école buissonnière, caracolant d’indépendance. Le contre-jour de certains clichés souligne la poésie de ces précieux instants.

 

Une cavale gambade dans les enganes et nous nargue de sa liberté. Des taches noires se signalent de leur meuglement. Un héron cendré arrogant observe le passage de la caravane. Il est hautain, un brin méprisant…

Toute génération confondue, jeunes et moins jeunes communient à cet événement qui se veut un métissage culturel. Il a pris naissance en 2022 et se perpétue par la volonté de Michèle Ricard et Paco Ortiz. Qu’ils en soient félicités et remerciés.

Florian, à côté de qui je chevauche, se remémore et me fait partager ses précieux souvenirs : les cabanes de pêcheurs de son enfance qui colonisaient ces lieux ; les cercles sans végétation, sorte de cratères laissés par le déminage d’après-guerre.

Lors d’une halte, Florian s’en ira de quelques mots à la gloire de ce père bien aimé, Denys Colomb de Daunant, et de son illustre grand-père, le marquis Folco de Baroncelli. Deux personnages qui ont contribué à façonner la légende de la Camargue que nous aimons.

Tout un symbole, une époque !… qui se perpétue grâce à ce camino dont la vocation est de faire vivre ce passé et d’entretenir ainsi ces traditions, cette histoire, qui devient notre histoire : Méjanes, Cacharel…

 

Chemin faisant, nous arrivons au Mazet, pour un pied-à-terre désaltérant : un Ricard nous est servi.

Le Vaccarès est à présent à nos pieds ou presque. Il frôle le rivage. L’eau, immobile, à peine frémit-elle en surface ! Le regard embrasse l’immensité apaisante.

Sous le soleil de midi, nos jambes se dégourdissent : l’occasion de quelques bavardages et impressions de voyage. Comme en apesenteur, le temps n’a plus de mesure, d’importance. Il est devenu relatif… Merci Albert ; merci Denys, Folco, Paul….

Mais bientôt, il faut songer à repartir, certains, les plus anciens, cherchent une pierre à selle, un avantage…

L’apéro nous attend, ainsi qu’une délicieuse gardianne que nous dégusterons plus tard dans la grande salle du Mas, tout près de l’âtre où crépitent les flammes qui dévorent et lêchent le bois.

Les murs couverts et tapissés des affiches racontent l’histoire des arènes du Mas voulues par Paul Ricard et de son célèbre Rejon D’Or. Depuis les Lescot, Fidani, Pierre Saurel (Le Pannard) jusqu’aux Stars d’aujourd’hui, en passant par les Cavaliers de L’Apothéose, ces centaures qui ont donné leurs lettres de noblesse au Temple de la tauromachie à Cheval : MÉJANES.

Emporté par la fougue et le rêve, j’allais oublier l’arrivée proprement dite dans la cour du Mas, avec la traditionnelle bénédiction par le père Brice, du domaine Attilon de Mas-Thibert.

Présence du groupe Gitano Familly et de Jules Romero pour une Salve María devant la croix.

Alors que nous mettons les pieds sous la table, Véronique veille au grain et surveille tout. Telle une abeille, elle butine, rien ne lui échappe, elle motive une équipe bien rodée et dévouée.

Un mot pour chacun, un sourire, après avoir chevauché à nos côtés, elle est en salle…

Comme toujours, toutes les bonnes choses ont une fin et comme en équitation les plus grandes difficultés sont les transitions.

 

Il va falloir se quitter… L’heure des Adieux est arrivée. On se promet des retrouvailles en 2026, encore plus nombreux. Nous étions presque cent ou un peu plus encore. Le cercle d’amis s’agrandit chaque année….

Paco sera là, il l’a promis, et avec Misionero ?… Ce n’est pas un pénitent. Je n’en dirai pas plus.

A l’An que ven ! …

Freddy Porte

Photos : Martine Clément