Devant
Un rang
En pleine lumière.
 
Encore cachés
On ne voit pas
Ceux de l’ombre.
 
Des corps
Seules les mains apparaissent
Et la moitié des visages.
 
Le reste
Enrobé
De luxe.
 
Un bras
Celui de la naturelle,
Secret dans une chasse.
 
L’autre
Inquiet
Dans une crispation.
 
Les jambes
Secouées
Des tremblements de la torture.
 
Ils regardent
Pour ne pas voir.
Les yeux comme une lame.
 
Le nez en plis.
La bouche aussi.
Et la barbe qui pousse plus vite.
 
Pesanteur
Lourde
D’une sentence inconnue.
 
Gravité
Sombre
D’une cour d’échafaud.
 
Une croix sur le sol
Dessinée
Du bout du pied.
 
Le pouce qu’on baise
Après le signe
Qui convoque le Golgotha.
 
La main
Qui touche le bois
De la mezouzah hébraïque.
 
Un envoi à gauche
A droite
Et detrás.
 
Dans une langue
Immuable
«Que Dios reparta suerte».
 
Cortège lent
Au pas
Suspendu.
 
Musique
Peut-être
Inutile.
 
Deux en noir.
Trois en or.
Neuf en argent.
 
Six montés.
Puis, les mules, leurs servants
Et ceux du sable.
 
Traversée
Ensemble
Du lieu.
 
De la prochaine solitude.
A l’unisson
Des zapatillas, des sabots et des baskets.
 
Procession
Solennelle
D’assignés à résidence.
 
Sans les cierges
Et les rouelles jaunes
De Torquemada.
 
Arrêt devant la barrière
D’autorité
En cravate.
 
Salut romain de bras levés
Et de tête découverte.
Derrière eux, le crottin fume.
 
Silence de musique.
La parade fut parfaite.
Comme un paseo de l’Inquisition.
 
Avant que ne sonnent
Les clarines
Du diable.
 
Rien de plus facile
Que
De lâcher prise.
 
Rien de plus grand
Que
De rester.
 
Patrice Quiot