PATRICE
« Nous sommes libres de lutter contre le sommeil de la mémoire et du cœur, de vaincre en nous la puissance formidable de l’oubli. »
François Mauriac
Phares blancs ; Buick, Chevrolet.
Et immatriculations MA, CA, SA ou SE.
Paco Camino de novillero et celui de la Bienfaisance de 1970.
Et Galloso y Manzanares toréant ensemble au capote avant José Mari avec «Clarín» à Madrid en 1978.
Carteles «Laminograf».
Et le portier emplumé de «L’Imperator».
Le vieux «Rubio».
Mozo d’espadas communiste.
Le Viti apodéré par Florentino Díaz Flores.
Avec Chaves Flores de lidiando dans le vent de Palavas.
Le boulevard Victor Hugo à double sens.
Et Roger Lacroix à «La Petite Bourse».
Manolo «Gordo», boucher de son état.
Qui fit découvrit les pieds paquets à Paquirri.
L’Espagne des copitas de tinto à deux ptas.
Et celle des limpiabotas infirmes.
Le café du Lyon.
Camille le patron et Paulette, sa femme.
Les enganes de chez Espelly.
Et Paul Laurent «Le Pape» les lundis de marché au vin.
Les lunettes noires de Pepe Cámara.
Et les vertes d’Hemingway.
Les courses de nuit.
Et une capea chez Clément où notre fille en pleurs ne voulait pas que je «torée».
Vic de Marcel Garzelli et de Jean-Claude Biec.
Eauze de Jean Fitte.
Et Manuel Martínez Flamarique.
Partout.
Jeannot Fabregoul à la «Petite Bourse», René et sa rabattue de cheveux à la Grande.
Et Marcel et ses pieds plats au «Parisien».
Pierre et Rosette Pouly, lui en chapeau, elle en gouaille.
Pedro Romero dans son restaurant de la rue Tour du Fabre.
«Le Chato», Gallardo, Mingau et Marotto «le plus bel espagnol d’Europe».
Sur la place du Forum quand passaient « Les Livianas » de Vivi et Marie-Jo.
Bayonne, «L’Amatcho», le chocolat de chez Cazenave.
Et Charly Forgues, vice consul de Norvège.
Mon petit frère renversé par une voiture.
Alors qu’il allait récupérer un pétard éteint sur le Bd Talabot.
Un «papier» de Vincent Bourg «Zocato».
Traduit en chinois.
Le 17 mai 1964.
Et Manuel Benítez avec le sobrero de Juan Pedro.
Les espontaneadas militantes.
Des toreros français.
Un dîner dans le patio de chez Darc à Dax, Teruel à la table d’à-côté.
Et un autre aux «Pyrénées » à Mont de Marsan avec Don Manuel…
Cocteau et Picasso.
En barrera.
Les corrales du Bd Natoire, le «Macareno».
Et l’homme à la pipe à la taquilla de la rue Alexandre Ducros.
Masson.
Et Pauline.
Les sœurs Ortega, la Milagosa.
Et «La Burgalesa».
Fernando Jardón et les gin-tonic.
Dans son bureau au 9 de la calle de la Victoria.
L’aïoli de «L’aficion cheminote»
Le vendredi matin de Feria sur l’Esplanade.
Paco Ruiz Miguel, Maríín Toro.
Et «El Formidable».
Kader.
Et le Nîmes Olympique de Jean Bouin
Les Gauloises à 90 centimes.
Et La Churascaia de Jean Lafont et de Jeannot Lopez.
« El Cartagenero » qui arriva dans une arène en parachute.
Qui tomba à la mer et fut, dit-on, mangé par un requin.
Et puis.
Et puis…
Muchos otros.
Beaucoup d’autres.
Vieux souvenirs
D’il y a si longtemps.
Comme autant de banderilles.
D’une sotte nostalgie.
Datos
Étymologiquement, le terme nostalgie vient du grec ancien nóstos (« retour ») et álgos (« douleur ») ; soit, le mal du pays.
Le dictionnaire Le Petit Larousse définit la nostalgie comme un « état de langueur causé par l’éloignement du pays natal ».
La nostalgie désigne souvent une mélancolie accompagnée d’un envoûtement par rapport à des souvenirs liés aux lieux de l’enfance, qu’on évoque à travers une jouissance qui est douloureuse.
Né vers 1522, Joachim du Bellay est un des premiers auteurs à évoquer la nostalgie avec son recueil «Les Regrets», publié en janvier 1558, où il exprime l’amour de son pays natal. Le sonnet «Heureux qui, comme Ulysse», qui figure dans ce recueil, est considéré comme l’archétype du texte évoquant la nostalgie.
Pour Chateaubriand, vers 1840, il ne s’agit plus d’une maladie mais d’un regret : « La nostalgie est le regret du pays natal. »
Au début du XXe siècle, Marcel Proust, a écrit de 1906 à 1922, correspondant à une publication de 1913 à 1927, les sept tomes de « À la recherche du temps perdu ». Cette œuvre aux relents très nostalgiques présente une intense réflexion sur la littérature, sur la mémoire et sur le temps.
Au XXIe siècle, Milan Kundera considère « L’Odyssée » d’ Homère et le personnage d’Ulysse comme « l’épopée fondatrice de la nostalgie ».
Sous un aspect plus philosophique, Albert Camus définit ce sentiment dans « Le Mythe de Sisyphe» en écrivant «La pensée d’un homme est avant tout sa nostalgie. »
Patrice Quiot