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PATRICE
Mercredi, 24 Février 2021

pq23ph

Lucha ganadera...

Un article d’Antonio Lorca paru dans «El Pais» du 21/02/2021 évoque l’assoupissement des empresas, des toreros et des ganaderos espagnols et leur peu d’entrain à défendre l’avenir de la fiesta brava en cette période de pandémie.

«… Callados, asustados, escondidos, amordazados, irresponsabilizados, como si esta historia no les afectara… » écrit-il.

Et il ajoute :

« … No ha vivido la fiesta de los toros un momento más dramático en toda su historia, y los taurinos no están moviendo un dedo para frenar esta tormenta perfecta que parece diseñada por los más feroces enemigos del espectáculo.

Es verdad que la solución a la inesperada pandemia no está en las manos de los taurinos; es cierto que la esperanza depositada en este año 2021 se desvanece con el paso de los días, pero lo que no tiene explicación alguna es que el mundo del toro esté desaparecido y pasivo, a la espera de que la vacuna devuelva una normalidad que nadie sabe cuándo ni cómo será posible… ».

L’attitude des ganaderos français plaide en sens inverse. Leurs revendications sont dites à haute voix et leur désespoir économique se manifeste à chaque fois qu’ils ont l’occasion de le faire.

On ne peut leur reprocher leur silence.

On ne peut les accuser d’irresponsabilité.

Ni de manque de courage.

En France, embusqués de Camargue, de la Crau, des Landes, du Gers, du pourtour des Alpilles ou des  Pyrénées-Atlantiques, c’est eux qui portent le fer pour la pérennité de la Fiesta Brava.

On ne peut que les féliciter de  leur combat.

Et les encourager à continuer de se battre.

Qu’ils ne soient pas entendus est une autre chose.

Mais ils montent au créneau.

Tous les jours.

Le trident por delante.  

Ils sont un exemple à suivre.

Par  nous tous.

Pour eux, avec notre immense estime et notre total soutien, ce texte de lutte d’Emile Zola:

«… Les femmes avaient paru, près d'un millier de femmes, aux cheveux épars, dépeignées par la course, aux guenilles montrant la peau nue, des nudités de femelle lasses d'enfanter des meurt-de-faim.

Quelques-unes tenaient leur petit entre les bras, le soulevaient, l'agitaient ainsi qu'un drapeau de deuil et de vengeance.

D'autres, plus jeunes, avec des gorges gonflées de guerrières, brandissaient des bâtons ; tandis que les vieilles, affreuses, hurlaient si fort, que les cordes de leurs cous décharnés semblaient se rompre.

Et les hommes déboulèrent ensuite, deux mille furieux, des galibots, des haveurs, des raccommodeurs, une masse compacte qui roulait d'un seul bloc, serrée, confondue au point qu'on ne distinguait ni les culottes déteintes, ni les tricots de laine en loques, effacés dans la même uniformité terreuse.

Les yeux brûlaient, on voyait seulement les trous des bouches noires, chantant la Marseillaise, dont les strophes se perdaient en un mugissement confus accompagné par le claquement des sabots sur la terre dure.

Au-dessus des têtes, parmi le hérissement des barres de fer, une hache passa, portée toute droite ; et cette hache unique, qui était comme l'étendard de la bande avait, dans le ciel clair, le profil aigu d'un couperet de guillotine.   -  Quels visages atroces ! balbutia Mme Hennebeau.

Negrel dit entre ses dents :   - Le diable m'emporte si j'en reconnais un seul ! D'où sortent-ils donc, ces bandits-là ?

Et, en effet, la colère, la faim, ces deux mois de souffrance et cette débandade enragée au travers des fosses, avaient allongé en mâchoires de bêtes fauves les faces placides houilleurs de Montsou.

À ce moment, le soleil se couchait, les derniers rayons, d'un pourpre sombre, ensanglantaient la plaine. Alors, la route sembla charrier du sang, les femmes, les hommes continuaient à galoper, saignants comme des bouchers en pleine tuerie.

-   Oh ! Superbe ! dirent à demi-voix Lucie et Jeanne, remuées dans leur goût d'artistes par cette belle horreur.

Elles s'effrayaient pourtant, elles reculèrent près de Mme Hennebeau qui s'était appuyée sur une auge. L'idée qu'il suffisait d'un regard, entre les planches de cette porte disjointe, pour qu'on les massacrât, la glaçait.

Négrel se sentait blêmir, lui aussi, très brave d'ordinaire, saisi là d'une épouvante supérieure à sa volonté, une de ces épouvantes soufflant de l'inconnu. Dans le coin, Cécile ne bougeait plus. Et les autres, malgré leur désir de détourner les yeux, ne le pouvant pas, regardaient quand même.

C’était la vision rouge de la révolution qui les emporterait tous, fatalement, par une soirée sanglante de cette fin de siècle.

Oui, un soir, le peuple lâché, débridé, galoperait ainsi sur les chemins ; et il ruissellerait du sang des bourgeois. Il promènerait des têtes, il sèmerait l'or des coffres éventrés.   Les femmes hurleraient, les hommes auraient ces mâchoires de loups, ouvertes pour mordre.

Oui ce seraient les mêmes guenilles, le même tonnerre de gros sabots, la même cohue effroyable de peau sale, d'haleine empestée, balayant le vieux monde, sous leur poussée débordante de barbares. »

Emile Zola.

«Germinal». 1885.

Va por ustedes, ganaderos franceses !

Datos :

-  Emile Zola : 2 avril 1840, Paris/29 septembre 1902, Paris.

- « Germinal », roman publié en 1885. Il s'agit du treizième roman de la série des Rougon-Macquart. Écrit d'avril 1884 à janvier 1885, le roman paraît d'abord en feuilleton entre novembre 1884 et février 1885 dans le Gil Blas. Il connaît sa première édition en mars 1885.

Patrice Quiot