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PATRICE
Mardi, 06 Avril 2021

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« Notre très cher ami Antoine Martin est mort cette nuit »...

 Antoine...

Le SMS de Joël Jacobi reçu ce 5 avril 2021 à 07h47.

10 mots.

Une belle mesure pour un une irréconciliable réalité.

Un coup de massue.

Camus.

L’incipit de « L’Etranger ».

Pour un clap de fin.

La peine de ne plus voir Antoine.

Le chagrin de ne plus l’entendre.

La pénitence de ne pouvoir maintenant que le relire.

Fulgurance de la langue.

Langue castillane de l’orthodoxie.

Langue andalouse du plaisir.

Langue française de l’élégance.

Langue d’aventure.

Mais aussi lengo nostro.

De Nages et Solorgues jusqu’à Sommières et Nîmes.

Traduttore, mais jamais traditore.

Une forme parfaite.

A nulle autre pareille.

Une minutie de luxe.

Un Benvenuto Cellini de l’écriture.

Un lexique exceptionnel.

Qui court de Cervantès à Mme Bergogne, de Juan Belmonte à l’arenero en chemise rouge nouée sur le nombril.

Qui va de Bergamín à Flaubert, de Daudet au Che.

De Gustave à José, d’Alphonse à Ernesto.

Qui unit le frère de Perez à Oriane de Guermantes et les fêtes votives de la Vistrenque aux bicornes de la Guardia Civil.

Qui roule de «L’Imperator» au «Gitan».

Et des plages de sable de l’Espiguette à celles de Saint Domingue et des manuscrits de La Laune.

Avec  cette si difficile ironie sur les choses de la vie.

Et une adorable acidité de manganèse en fusion.

Langue de plaisir.

Langue de liberté.

Langue d’Antoine.

Un échanson des mots.

Mais aussi.

Parole affranchie en éclats de rire, parole coquine des chistes de soirs de féria, parole d’errance dans la nuit des toros.

Parole en cascade.

Des éblouissements en roue libre.

De surprise en surprise.

Marivaudage de l’intelligence dans les propos de ceux qui y cherchent des racines.

Et, toujours déjà là, Yannick.

Yannick aux yeux verts.

« Notre très cher ami Antoine Martin est mort cette nuit ».

10 mots.

Un déchirement.

Et sur ma vieille tronche et ma guibole infirme,

Un putain de coup de massue de mis guevos.

Descanse en paz Antoine.

Un abrazo céleste amigo de mi alma.

Patrice Quiot