Jeudi 18 Avril 2024
PATRICE
Mardi, 31 Août 2021
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El verdugo…
 
Il n’est pas du matin.
Ne porte pas de cagoule.
 
Il n’a pas d’âme.
Il est seulement là.
 
Courtaud et affublé d’une barrette.
Il n’est pas beau.
 
Il n’est pas fait pour le plaisir.
Des gestes solennels.
 
Il ne connait des mots.
Que leurs éructations.
 
Des couleurs.
Pas même le nom.
 
Et de la musique.
Qu’une note répétée.
 
Il n’est pas dans la légende.
Des Sanson et du pain retourné.
 
Il ignore la gloire.
De la main mouillée de sang.
 
Il ne sait rien des triomphes.
En bouquets de fleurs.
 
Il n’est pas considéré.
C’est un accessoire.
 
Il n’est pas aimé.
C’est un auxiliaire.
 
Il n’est pas touché.
Par les mains des filles.
 
Il intervient.
Occasionnellement.
 
Jamais en début.
Toujours au terme.
 
On va le chercher.
Presque à regret.
 
Pour en finir.
Vite, si possible.
 
Il ne voyage pas.
Si ce n’est de la barrière au tercio.
 
Il n’a d’autre horizon.
Qu’une nuque déchue.
 
Et d’autre destin
Que de faire son office.
 
Il ne procède.
Que par saccades.
 
Il ne coupe pas.
Il sectionne.
 
Il ne tue pas.
Il finit de le faire.
 
Il peut être malhabile.
Et entendre les lazzis.
 
Quand il ne l’est pas.
On lui rend peu d’hommage.
 
Il vit dans le fond
Du fundón.
 
Seul.
Méprisé par ses colocataires
 
Il n’a pas d’amis.
Si ce n’est sa capuche de cuir.
 
Et Puntilla, son assistant.
Là, pour achever.
 
Verdugo.
Est son nom.
 
Bourreau en est la traduction.
Un mot terrible.
 
Sans indulgence.
Comme lui.
 
Datos 
 
*Le verdugo est une épée que le matador utilise pour porter le descabello si son estocade n'a pas été efficace.
 
La lame du verdugo est plus large que celle de l'épée d'estocade, elle est également plus courte. Depuis 1936, elle est munie d'une barre qui forme une croix près de la pointe. Cette barrette a pour but d'arrêter la pénétration de la lame, ce qui réduit les risques de blessures dans les gradins, lorsque le taureau a un sursaut et que l'épée rebondit.
 
Avant 1936, le matador donnait le descabello avec l'épée ordinaire. Mais le taureau, dans un dernier sursaut, peut se redresser et projeter l'épée sur les spectateurs. Ce fut le cas en 1915 lorsque l'épée de Joselito tua un de ses amis dans les gradins de Saragosse. En 1930, à Tortosa, le torero mexicain Manolo Martínez provoqua de cette même manière la mort d'un spectateur. Le 6 août 1934 à La Corogne, ce fut l'épée de Juan Belmonte qui tua un spectateur. On attribue à ce dernier accident la décision de réformer l'instrument du coup de grâce.
 
Ignacio Sánchez Mejías avait envisagé d'attacher l'épée à son poignet pour éviter les rebonds accidentels, mais cette solution, trop dangereuse, ne fut jamais mise à exécution.
 
L'invention de l'épée à « cruceta » est due au torero Vicente Pastor.
 
*Dans le film éponyme de Luis Garcia Berlanga, sorti en 1963, José Luis, un employé des pompes funèbres, rencontre Amadeo, un bourreau en fin de carrière.
 
Ce dernier lui présente sa fille Carmen.
 
Les jeunes gens se marient et s'installent dans l'appartement que l'Administration accorde à Amadeo. Craignant d'être expulsé, José Luis accepte, non sans mal, de succéder à son beau-père dans ses fonctions.
 
Convoqué à Majorque pour sa première exécution, José Luis jure de ne plus recommencer.
 
Amadeo rétorque : « Moi aussi j'avais dit ça la première fois ! ».
 
Patrice Quiot