Vendredi 19 Avril 2024
PATRICE
cal09h
 
Callejón…
 
Seul, le sésame.
Accroché autour du cou et vérifié par l’argousin.
Y donne droit.
 
On y accède.
Par des voies secrètes.
Presque clandestines.
 
Au-delà de grilles.
Ou de portes de fer.
 
Un sol en terre.
Des briques.
Ou du béton pour s’adosser.
 
Etroit.
Encombré.
 
Sans pouvoir bouger.
Derrière le bois gris ou rouge.
Du burladero affecté d’une marque ou d’un matricule.
 
Debout.
A côté de mates.
Qu’on ne choisit pas.
 
Des mégots au sol.
Des inconnus qui passent.
Et qui vous braquent des clopes.
 
Abrazos de caïds.
Ou regards en coups de canifs.
Et arrangements pour de nouvelles cavales.
 
On connait les anciens.
Qui ont tous un passé.
 
On observe les jeunots.
Qui cherchent à s’en créer un.
 
Milieu fermé.
 
Organisation secrète.
Dans le désordre parfaitement ordonné d’un rituel ancestral.
Avec les terrifiantes histoires des tricards qui furent à jamais bannis pour n’avoir pas voulu s’inscrire dans un ordre.
 
Une sorte de thurne very hype.
 
A ciel ouvert.
 
Tout ça.
Avant.
Que ne paraisse la violence dans sa forme la plus magnifique.
 
Alors.
 
Ce couloir aux effluves mélangés d’eau de toilette capiteuse.
Et de grésil de sentiments.
 
 
Devient
Unique.
Exclusif.
 
On entre dans un autre monde.
On quitte le commun.
On est ailleurs.
 
Le reste.
L’extérieur.
N’a plus d’importance.
 
Dans ce couloir devenu celui de Sing Sing.
Chacun cherche son Christ.
En voyant l’autre porter sa croix.
 
Dans cet œcuménisme de contraction.
On se situe.
Dans le raccourcissement,
L’intériorisation.
 
Dans la convulsion.
Dans la crampe.
 
Interdits de bouger.
Au risque de se faire houspiller.
Par l’autorité.
 
Et condamnés à l’immobilité.
Pour encore plus encaisser.
Le terrible de ce qui se passe juste à côté.
 
Empoignade remplie de sens.
Baston de grâce.
Plaisir d’attouchements interdits.
 
Qui font déjanter les sens.
 
Vue brouillée.
Par l’or des alamares des costumes
Et le tranchant des estoques.
 
Odorat confondu par l’odeur métallique du sang,
Goût anéanti par le sec de la peur.
Ouïe perdue dans les souffles terribles et touchers gelé par la moiteur des paumes.
 
On est près.
Très près.
Peut-être trop.
 
Avec l’envie que tout ça en finisse.
Pour faire la planche.
S’enfuir de ce merveilleux enfer.
 
Car, quoiqu’il arrive au-delà des barrières du couloir.
Tous ou presque en sortiront autre.
Exsangues.
 
 
Cette proximité qui effraie.
Fascine, éblouit.
Fait fatalement perdre le sens de la mesure.
 
Et la fréquentation assidue de l’endroit.
Rend nécessairement ses réclusionnaires.
Délicieusement jobards !
 
Patrice Quiot