Mercredi 24 Avril 2024
PAMPLONA
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Vient de sortir : « Pamplona - Encierros », un superbe ouvrage de Michel Brès…
 
Dusse sa modestie en souffrir, Michel Brès est à Nîmes une figura. Sur au moins deux plans, celui d’un fidèle depuis longtemps à la cavalerie Heyral, mais aussi à la San Fermín de Pamplona, et plus particulièrement de ses encierros.
 
Pour lui, la date du « siete de julio » est marquée en gros et en blanc comme une borne incontournable et après des dizaines d’années à fréquenter l’endroit, c’est finalement assez naturellement que Michel en est venu à vouloir transmettre sa passion, que dis-je, sa dévotion, au travers d’un ouvrage de pas moins de 344 pages (format 24,5 x 30cm) pour presque autant de photos et un poids de… 1,4 kg !!! Bref, un authentique monument…
 
Rencontré récemment, j’ai pu m’entretenir avec lui sur ses motivations pour l’écriture, mais aussi la photographie, dans ce livre où les moindres recoins de l’encierro sont évoqués, et surtout montrés…
 
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« En 1966, je suis entré à la SNCF et deux ans plus tard, j’ai fait partie d’un club taurin, l’Aficion Cheminote Nîmoise présidée par René Ravel, qui chaque année organisait un voyage à Pamplona pour la feria. En 1970, j’y suis allé pour la première fois avec ce groupe. J’ai alors découvert Pamplona, mais c’était un peu compliqué quand on arrive pour la première fois dans un endroit aussi magique que l’on ne connait pas. J’avais l’impression d’être sur une autre planète, mais comme j’ai toujours aimé faire des photos, j’avais apporté un petit appareil comme on avait à l’époque. Je ne connaissais pas bien la ville, je n’étais jamais placé au bon endroit, je n’arrivais jamais au bon moment, j’étais trop en avance, ou en retard, je prenais malgré tout quelques photos, mais qui n’avaient aucune valeur pour prétendre en faire un livre.
 
Je suis retourné à la San Fermín en 71 et les années suivantes, puis plus tard, disons fin 70/début 80, j’ai un peu couru l’encierro dans Estafeta pour voir ce que c’était, mais franchement, j’ai eu peur. Lors du dernier encierro que j’ai couru, il s’est formé à l’entrée de la plaza de toros un montón impressionnant et là, j’y ai échappé de justesse ! En fait, si j’ai eu peur, ce n’était pas tellement des toros, mais surtout de la foule. Avec les coureurs de Pamplona, il n’y a aucun problème, mais s’y ajoutent beaucoup de gens qui ne savent pas, qui font n’importe quoi, n’importe où. C’est ce qui m’a décidé à ne plus courir l’encierro. 
 
Comme j’avais l’aficion à la photo, je me suis alors équipé d’un matériel un peu plus sophistiqué. J’ai commencé à faire vraiment des photos, mais mon matériel était toutefois encore un peu juste pour prétendre en faire techniquement abouties. Progressivement, le matériel s’est amélioré… et à la force d’en tirer, moi aussi ! Chaque année, j’en prenais beaucoup à Pamplona, essentiellement d’encierros car à l’inverse, j’en faisais très peu de corridas, d’abord parce que j’étais assez mal placé dans la plaza et puis parce que tout le monde en fait ! Je fais donc essentiellement des photos d’encierros et d’ambiance dans la fête. 
 
Il y a beaucoup de gens qui vont en Espagne faire une feria, puis l’année suivante une autre différente, mais en ce qui me concerne, je retournais chaque année à Pamplona, ce qui m’a permis de faire connaissance avec des gens extraordinaires avec lesquels on s’est liés d’amitié, pour ne pas dire que quelque part, on est presque devenu de la famille ! J’y suis aussi retourné fin novembre/début décembre car fin novembre il y a la fête de San Saturnino et début décembre, celle de San Francisco Javier, le patron de la Navarre. Pendant une semaine, c’est une fête qui m’a encore plus rapproché de mes amis. C’est différent de San Fermín, mais il y a quand-même des animations, processions, Gigantes y Cabezudos, mais pas d’encierros.
 
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Dans mes connaissances, pas tous mais la plupart ont fait l’encierro quand ils étaient jeunes. Il y a quelques années en arrière, j’ai connu un coureur qui d’ailleurs se trouve plusieurs fois dans le livre. Il ne court qu’à Pamplona, dans la calle Estafeta. Ceux qui se déplacent pour courir dans les fêtes des villages alentour sont une minorité. A Pamplona, les divinos ont un secteur bien précis, ils courent toujours au même endroit. 
 
Quand il se lève tous les matins, celui que je connais se met en tenue et part depuis son domicile - qui se trouve dans un quartier assez éloigné du parcours - en petite foulée afin de s’échauffer. Arrivé sur le parcours, il rencontre d’autres coureurs et ensemble, ils font des mouvements pour parfaire leur préparation. Le soir, après la corrida, mon ami rejoint rapidement sa maison pour être en forme le lendemain matin. C’est le quotidien pendant sept jours du vrai coureur d’encierro.
 
Concernant les secteurs du parcours, ils sont tous dangereux. Le départ à Santo Domingo, c’est excessivement risqué car les toros démarrent à une vitesse épouvantable et le coureur se met devant les bêtes pendant seulement quelques secondes avant de s’écarter car ça va très vite. On est entouré de milliers de personnes, tout va à cent à l’heure, le danger venant de toutes parts. Ensuite, il y a Mercaderes, c’est très court, mais il y a un gros problème, c’est qu’on prend le soleil en pleine face, ce qui risque d’éblouir les coureurs. Apès, il y a ce fameux virage qui à l’époque était très dangereux et maintenant, ils l’ont remodelé avec des pavés antidérapants. Avant, les toros se sont mis à tomber lorsque les coureurs ont été de plus en plus nombreux et les toros étaient dépistés, ils ne savaient plus très bien où aller. Après, la calle Estafeta est très longue et elle monte beaucoup, car contrairement à ce que peuvent penser les gens qui ne le connaissent pas réellement, le parcours est loin d’être plat ! Dans cette rue, il n’y a pas trop de refuges, elle est droite et il faut courir avant de déboucher sur le dernier tronçon, le seul endroit où ça descend un peu, celui qui mène aux arènes. D’ailleurs, dans mon livre, j’indique les dénivelés.
 
Pour faire de bonnes photos, c’est assez compliqué. A part les photographes professionnels qui sont aux bons endroits et qui mitraillent, il faut se débrouiller pour espérer avoir quelques bons clichés. Soit en se postant aux arènes, soit sur un balcon car il n’y a pas vraiment d’endroits où il y a des gradins. Le problème, c’est que les gens louent les balcons pour un spectacle qui dure quelques secondes. Je n’ai jamais choisi cette solution surtout que, outre les tarifs, lorsque vous arrivez, vous risquez de vous retrouver au troisième ou quatrième étage, ce qui représente un surplomb très important. Je me place donc aux arènes, mais parfois, j’ai pu profiter d’un balcon par le cousin de mon ami. Il me le prêtait, j’y prenais même mon petit déjeuner, je faisais mes photos tranquille et ça ne me coûtait rien. 
 
Concernant les photos du livre, je dois dire que malheureusement, j’ai 52 ans de Pamplona dans les jambes et j’en ai plus fait que ce qu’il me reste à faire ! J’aurais aimé qu’il y ait 52 ans de photos, mais comme je te l’ai expliqué, je n’étais pas très bien équipé au début. Donc, pratiquement, les photos sont assez récentes. Les trois premières photos ont été réalisées par mon père, je tenais à les publier car elles sont relativement anciennes. Il y en a aussi une où l’on me voit avec l’appareil en train de l’utiliser, celle-là a été faite par Christian Chalvet.  Mais toutes les autres sont de moi. 
 
 
J’ajoute que sur la couverture, j’ai fait figurer un appareil photo parce qu’en fait, je les collectionne. Celui-là, c’est le premier appareil que l’on m’a donné, celui qui a débuté ma collection ! Il avait été acheté à la pharmacie Gamel car à l’époque, c’est dans les pharmacies qu’ils étaient vendus. Il n’y avait pas de commerces de matériel photo et les pharmacies vendaient des produits pour développer les photos et en même temps, ils vendaient des appareils. Dans le livre, il y en a un autre qui correspond au premier appareil que j’ai acheté à Pamplona !  
 
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Pourquoi j’ai fait ce livre ? Parce qu’en 2020, au lieu d’aller à Pamplona, je suis resté à ma maison ! Comme tout de monde, d’ailleurs, inutile de revenir sur les raisons. En 2021, rebelote, alors j’ai pris mes albums photo et je me suis dit, pourquoi pas en faire un livre sur les encierros de Pamplona. J’avais le choix entre montrer tous les aspects de la feria de San Fermín, ou cibler surtout sur les encierros. Soit des photos de l’encierro en elle-même ou qui ont un rapport direct avec elle. 
 
Sans aller à Pamplona, ça m’a permis durant ces deux saisons de pandémie, de rester un petit peu dans cette atmosphère. Je ne suis pas allé, mais quelque part, Pamplona est venue chez moi !
 
En ce qui concerne la distribution, ce livre, édité à compte d’auteur, vient juste de sortir sous presse et pour le moment, on peut le trouver dans trois librairies nîmoises (Goyard, L’Itinéraire et Teissier) et je dois aller le présenter dans quelques clubs taurins. 
 
 
J’ajoute que j’ai dédié ce livre à mes parents, à tous mes amis de Pamplona et ceux d’ici, avec une préface de Daniel Jean Valade. Au départ, j’aurais voulu une préface du maire de Pamplona en espagnol, basque et français. Avec les problèmes de la pandémie, je n’ai pas pu me déplacer, alors j’ai tenu que ce soit quelqu’un d’ici, taurin, mais qui ne connaisse pas de l’intérieur la feria de Pamplona. Pour une vision différente.
 
Il y a très peu de texte dans le livre, iniquement quelques pages explicatives et un seul en espagnol. J’ai tenu à mettre l’affiche de l’année 1951 car c’est mon année de naissance et celle de 1970 qui correspond à la première fois où je suis allé à Pamplona. 
 
En outre, je tiens à préciser que ce livre est sorti à 140 jours de la San Fermín 2022. 140 jours, ce n’est pas un hasard… car ça correspond à mon jour de naissance. Comme quoi, il n’y a pas de hasard ! »
 
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Comme sur le parcours, à l'encoignure d'une porte...
 
Voilà, si vous voulez vous plonger dans l’atmosphère d’un encierro à Pamplona par l’objectif d’un de ses fidèles, vous n’avez plus qu’à vous procurer son ouvrage. A vrai dire, un livre de collection, fruit d’une bien belle faena. Dos orejas y rabo, Maestro !!!