Jeudi 28 Mars 2024
PATRICE
Mardi, 28 Juin 2022
 pq28ph
 
Partir…
 
Qu’il est doux de partir.
 
Pour vivre une féria.
 
Un matin d’été.
 
 
 
La route défile.
 
Et comme autant de passes.
 
Les paysages aussi.
 
 
 
Des lignes droites.
 
Longues et belles.
 
Comme une arrancada.
 
 
 
Des virages.
 
Ronds et gracieux.
 
Comme une naturelle.
 
 
 
A l’Est le ciel bleu.
 
Celui de l’acier de la Ruhr, de Moscou en flammes, des plaines de Sibérie.
 
Et, au-delà, celui de la Chine des mandarins cruels et des gamines aux pieds bandés.
 
 
 
Avec le soleil.
 
Au milieu du pare-brise.
 
 
 
A l'Ouest, l’Atlantique de Colomb.
 
Et l'Amérique de Buffalo Bill.
 
 
 
A l'horizon du Nord, la Scandinavie des poupées blondes.
 
Et les pingouins noirs de l'Arctique.
 
 
 
Et au Sud, Cervantès, les moulins de la Mancha, les pêcheurs de thon de Barbate.
 
L’Algérie de mes origines et l’Afrique des colonies.
 
 
 
Les arbres du bord de la route.
 
Sont des amis.
 
Qui nous saluent depuis leur burladero.
 
 
 
On donnerait presque des abrazos.
 
Aux platanes.
 
Et notre cariño aux chênes.
 
 
 
On traverse des ponts.
 
Sous lesquels coulent.
 
Des rivières.
 
 
 
On essaye de chercher.
 
D’où elles viennent.
 
Et où elles vont.
 
 
 
On aime
 
Leur errance.
 
Eternelle.
 
 
 
On traverse des villages.
 
Et lieux dits.
 
Aux noms étranges.
 
 
 
Certains.
 
Pourraient être.
 
Ceux portés par des toros.
 
 
 
Le café bu dans un bar de campagne.
 
A le bon goût.
 
De la liberté.
 
 
 
Et les manchettes du journal.
 
Qu’on lit sans vraiment s’y intéresser.
 
Nous confirment qu’on est loin de tout.
 
 
 
Le sac sur le siège passager.
 
On quitte la banalité
 
Du quotidien.
 
 
 
Comme les hoboes de Kérouac
 
On est seul.
 
Et bien.
 
 
 
Les cigarettes.
 
Nous irritent la gorge.
 
Mais on s’en moque.
 
 
 
On aime leur odeur âcre.
 
Et les volutes bleues.
 
De leur fumée.
 
 
 
On pense aux amis.
 
Que plus tard.
 
On verra.
 
 
 
On pense au peu qu’on a réussi.
 
Et au beaucoup qu’on a manqué.
 
 
 
On pense aux quelques faenas.
 
Qui nous restent à faire.
 
 
 
Et qui maintenant tiennent.
 
Dans l’aune d’une demi-page d’un cahier d’écolier.
 
 
 
Mais on sait que bientôt on arrivera.
 
Dans une ville parée des couleurs de fête.
 
 
 
On sait que dans la chambre de l’hôtel.
 
Aux volets fermés de fraîcheur.
 
 
 
On rangera les affaires.
 
Avec la même attention.
 
 
 
Que celle du mozo.
 
Préparant la chaise.
 
 
 
Et puis, douché.
 
Rasé de frais.
 
Parfumé d’élégance.
 
 
 
On sait qu’on sortira.
 
Pour respirer l’air.
 
A l’odeur unique d’une ville en féria.
 
 
 
Sachant que lorsque là.
 
Tout sera fini.
 
On sait qu’on repartira autre part.
 
 
 
De la même façon.
 
Pour une autre.
 
Aventure.
 
 
 
Rêve d’un ainsi.
 
Que j’aurais aimé être celui de ma vie.
 
 
 
C’est ce que je me dis.
 
Chaque fois que je monte dans ma voiture.
 
 
 
Pour partir.
 
Loin.
 
 
 
En rêvant.
 
Patrice Quiot