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Lundi, 15 Août 2022
chinitas15ph
 
Le Café de Chinitas…
 
Le « Café de Chinitas », petite taverne, café-concert situé à Málaga, entre 1857 et 1937, accueillait sur sa scène minuscule, des spectacles de flamenco, où défilaient tous les meilleurs cantaores gitans du pays.
 
S’y retrouvaient les artistes et intellectuels espagnols des années 1930 (Salvador Dali, Pablo Picasso, Federico García Lorca . . .).
 
La légende raconte que « Paquiro », torero mythique, défia en ce lieu l’un de ses frères le traitant de “torero de pacotille”. Cette aventure, gravée dans les mémoires et transformée en chanson populaire, fut collectée et mise à l’écrit par Federico García Lorca.
 
Depuis, ce chant aux allures théâtrales a été porté par des interprètes, telle la chanteuse lyrique mezzo-soprano espagnole, Teresa Berganza et de nombreux chanteurs de flamenco. 
 
En 1960, le chanteur, Antonio Molina, originaire de la province de Málaga, rendit hommage, avec son alter ego Rafael Farina, au « Café de Chinitas », lieu mythique, entre la calle Santa María et la plaza de la Constitución, en lieu et place d’un couvent d’Augustines fermé en 1937 en raison de la Guerre Civile, dans un film au titre éponyme où, figurait la bailaora Eulalia del Pino, ainsi que le légendaire guitariste Niño Ricardo.
 
Pour les uns, Chinitas désignait les petites pierres recouvrant le sol du patio originel, pour les autres, « Chinitas », avec un “c” majuscule, était le nom de scène d’un célèbre acteur de théâtre, Gabriel López, qui avait l’habitude de s’y produire. Il faut dire que le lieu n’était pas, comme on le pense généralement, un café chantant dédié uniquement au flamenco, mais un caf’conç et un café-théâtre plus généraliste.
 
Au « Café de Chinitas », lieu mal famé et temple de l’art andalou chanté en 1931 par La Argentinita accompagnée au piano par Federico García Lorca lui-même, se sont produites certaines des plus grandes figures du flamenco : Dolores La Parralla, Juan Breva, Antonio Chacón, La Trini, El Canario, La Rubia, La Cuenca, Fernando el de Triana, El Petrolo, El Porrilla, El Pena padre, Anilla la de Ronda, Paca Aguilera, las Hermanas Navarro, Estrellita Castro, Lucrecia Torralba, Isabelita Ruiz, Luisa Albéniz, Diego el Perote, Manuel Torres, Pastora et Tomás Pavón, Cayetano Muriel, Manuel Vallejo, el Niño de la Huerta, El Carbonerillo, Manolo Caracol, Canalejas de Puerto Real, Cojo de Málaga, Pepe Palanca, Juan de la Loma, Pepe Marchena et Juanito Valderrama...
 
Sans oublier les guitaristes Salvador Rodríguez et Juan Navas, et les danseuses La Macarrona, la Juana, la Mejorana, et La Rita qui s’y livrèrent une véritable “battle” tout une nuit durant, au terme de laquelle la seconde mourut d’épuisement.
 
Peu importe si Lorca commet un anachronisme en y situant le matador « Paquiro », mort six ans avant l’ouverture de ce qui deviendra la cathédrale flamenca de Málaga.
 
« El Café de Chinitas » se chante la voix forte et la poitrine relevée, s’accompagne de palmas, de cajón et de guitare andalouse.
 
« Au café de Chinitas
Paquiro dit à son frère :
Au café de Chinitas
Paquiro dit à son frère :
 
"Je suis plus courageux que toi,
Torero et gitan de première".
"Je suis plus courageux que toi,
Torero et gitan de première".
 
Paquiro sortit sa montre
Et dit ainsi :
Paquiro sortit sa montre
Et dit ainsi :
 
"Ce taureau doit mourir
Avant quatre heures et demie".
"Ce taureau doit mourir
Avant quatre heures et demie".
 
L'horloge sonna quatre heures
Ils sortirent du café,
L'horloge sonna quatre heures
Ils sortirent du café,
 
Paquiro était dans la rue,
Torero de première,
Paquiro était dans la rue,
Torero de première. »
 
Datos 
 
A l’époque contemporaine, entre 1970 et 2021, « Le Café de Chinitas », au numéro 7 de la calle Torija, était le plus andalou des tablaos madrilènes.
 
Créé en 1970 par la famille Verdasco qui gère, entre autres, le plus madrilène des restaurants castillans, La Bola, l’établissement était situé à l’étage d’un palais du 17e siècle du quartier huppé des Austrias, pas bien loin du bunker sénatorial et à une centaine de mètres de l’opéra récemment remis à neuf.
 
A cause de la pandémie, le «Café de Chinitas» a définitivement fermé ses portes en mars 2021.
 
Francisco Montes Reinadit « Paquiro », né à Chiclana de la Frontera (Espagne, province de Cadix) le 13 janvier 1805, mort à Chiclana de la Frontera le 4 avril 1851.
 
Disciple de Pedro Romero à l'École de tauromachie de Séville, « Paquiro » fut un grand innovateur de la corrida, notamment dans le maniement du capote. Il prend l'alternative à Madrid (Espagne) le 18 avril 1831, avec comme parrain Juan Jiménez « Morenillo ».
 
À partir de 1840, il entre en rivalité avec l'un des plus grands matadors de cette époque, « Cúchares ».
 
Il poussa à une importante rénovation de la corrida, lui appliquant un sentiment artistique et créateur, définissant clairement le but de chacun des intervenants. Il a été l'inspirateur du traité de tauromachie qui porte son nom, rédigé par le chroniqueur taurin Santos López Pelegrín, ainsi que des dispositions du premier Reglamento oficial dont les rédacteurs reprirent ses propres suggestions. » Il fut le premier à employer le terme frente por detrás pour désigner une passe de cape que Pepe Hillo avait décrite sous le nom d'Aragonesa. Il modifia aussi l'habit de lumières et imposa l'usage d'une nouvelle coiffe, depuis appelée en son honneur « montera ».
 
Il reçut de nombreuses cornadas qui, ajoutées à son penchant immodéré pour la boisson, diminuèrent progressivement ses facultés. Il se retire en 1847, puis redescend dans l'arène en 1850 afin de refaire une fortune largement entamée par de mauvaises affaires dans le négoce du vin. Mais le « Paquiro » de cette époque n'a plus grand rapport avec celui des premières années.
 
Patrice Quiot