Jeudi 28 Mars 2024
PATRICE
Vendredi, 06 Janvier 2023
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«Le Prolé»…
 
« La vie est en général joyeuse. […] Elle est joyeuse dans les pires moments, elle a un goût de joie comme les roses ont une odeur de rose. […] Ce qui nous rend injustes à son égard, c’est que la joie ne fait pas souvenir. Elle est trop mêlée à tout le reste, elle est trop naturelle, elle est insaisissable. Au lieu que l’inquiétude, elle, demeure. »
 
(Jean Paulhan à Robert Mallet/1952).
 
 
C’est.
 
A Nîmes.
 
 
 
Tout près.
 
Des arènes.
 
 
 
Dans la rue.
 
Jean Reboul.
 
 
 
Où le même, catholique royaliste, fils de boulanger.
 
Ecrivait ses poèmes en langue provençale.
 
 
 
Là où Antoine Bigot écrivait les siens.
 
En parler nîmois.
 
 
 
«Impur patois qui s'éteint ».
 
Mais la langue la plus populaire de la ville.
 
 
 
Au N°20.
 
Où naquit Jean Paulhan.
 
 
 
C’est.
 
«Le Prolé».
 
 
 
Depuis.
 
1917.
 
 
 
L’année où vinrent au monde.
 
Juanita Cruz.
 
 
 
Manuel Laureano Rodríguez «Manolete».
 
Ella Fitzgerald.
 
 
 
Carson Mc Cullers.
 
John Fitzgerald Kennedy, Álvaro Domecq…
 
 
 
L’année où.
 
Sous la neige de Moscou.
 
 
 
Octobre.
 
Fut magnifique.
 
 
 
Et où à Madrid, le 22 avril.
 
«Cocinero», un toro de Benjumea, tua Florentino Ballesteros.
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
Il y a le couloir.
 
Long, étroit et sombre.
 
 
 
Presque.
 
Celui des arènes d’Arles ou de la México.
 
 
 
Dans lequel.
 
Là-bas comme ici.
 
 
 
On forge ses convictions.
 
Pour mieux les exprimer.
 
 
 
Au «Prolé».
 
Après le couloir.
 
 
 
Il y a la cour.
 
Qui, autrefois.
 
 
 
Fut un jardin.
 
 
 
Dont parlait à son fils.
 
Le père de Jean Paulhan :
 
 
 
« Je croyais que tu avais vu, avant notre départ de Nîmes, le jardin de la rue Jean Reboul à côté duquel tu es né et que tu as quitté à dix mois environ. Ce jardin avait 27 mètres de long sur 12 de large en moyenne [...] mais il a été un monde pour moi, un monde aux contrées variées. Dans l'ensemble, il m’apparaît comme un pays luxurieux, chaud, éclatant et parfumé [...] C'étaient des lauriers qui tapissaient le mur de gauche, exposé au Nord et qui, vers le bout de l'allée, en garnissait les deux côtés. Le mur exposé au midi, au contraire, était clair, ensoleillé, tapissé de grands rosiers grimpants qui se couvraient, à la saison, de petites roses jaunes, et il était toujours, au temps chaud, sillonné de lézards gris. »
 
 
 
Les murs.
 
De pierre sèche.
 
 
 
A l'ombre.
 
Des mûriers.
 
 
 
En ont.
 
Conservé l’esprit.
 
 
 
Celui.
 
Du soleil des amis.
 
 
 
Et des fleurs.
 
De la lutte.
 
 
 
Celui de Solal et Lalo.
 
L’esprit de Christian.
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
La fête.
 
Est belle.
 
 
 
Comme.
 
Celle.
 
 
 
D’une.
 
Révolution joyeuse.
 
 
 
De paroles.
 
De liberté.
 
 
 
Et d’abrazos.
 
Sincères.
 
 
 
On y retrouve.
 
La vérité que l’on cherche.
 
 
 
Dans la vie.
 
Ou dans le toreo.
 
 
 
Loin des scellés.
 
Qui le condamnèrent en septembre 1939.
 
 
 
Loin du franquisme.
 
De mala muerte.
 
 
 
Quand Juan Belmonte Campoy.
 
Était leader de l’escalafón.
 
 
 
Mais près de l’Espagne.
 
Garrottée.
 
 
 
Par ceux qui.
 
Entre Viznar et Alcafar.
 
 
 
Tuèrent.
 
Un rossignol.
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
Dans les années.
 
Cinquante.
 
 
 
Les tables et les chaises.
 
Etaient peintes en rouge.
 
 
 
Et c’était bien.
 
Ainsi.
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
Dans les sixties.
 
La cour aux mûriers s'ouvrait sur toute la ville.
 
 
 
Des élèves du lycée Alphonse Daudet.
 
Aux mécanos de la gare de marchandises.
 
 
 
De la route de Sauve.
 
A Calvas.
 
 
 
A tous.
 
Il s’ouvrait.
 
 
 
Dans une farandole.
 
De poings levés.
 
 
 
Quand Nikita Khrouchtchev vint à Nîmes
 
Le «Prolé» s’habilla de luces.
 
 
 
Aux couleurs.
 
De l’Union Soviétique.
 
 
 
Et Youri Gagarine.
 
Y fut reçu.
 
 
 
Quand le bar en face.
 
S'appelait “Cuba Libre”.
 
 
 
Trois ans après.
 
La faena de Benítez du 17 mai 1964.
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
On allait les mains dans les poches.
 
Dans la jeunesse de «Capea»
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
On allait en mobylette
 
Avec la fougue de «Miguelín ».
 
 
 
Au « Prolé».
 
 
 
On allait à pied.
 
Avec Michel Gilles, Christian Liger et Maurice Laurent.
 
 
 
Au « Prolé ».
 
 
 
On allait en cheveux longs.
 
Avec la rabia de «Paquirri».
 
 
 
On y trinquait.
 
A l’élégance du «Viti».
 
 
 
Ou au visage grave.
 
De Dámaso.
 
 
 
On y chantait.
 
La belle vie.
 
 
 
D’Aragon.
 
Ou de Ferrat.
 
 
 
De «La rose et le réséda».
 
A «Potemkine».
 
 
 
On y dansait.
 
La Carmagnole.
 
 
 
En pattes d’eph.
 
Et bottes gardianes.
 
 
 
Au «Prolé».
 
 
 
J’allais.
 
Vais et irai encore.
 
 
 
Avec toujours.
 
Le même plaisir.
 
 
 
Un beau livre.
 
Dans la tête.
 
 
 
Et une muleta rouge.
 
Dans le cœur.
 
Sources : « La Contre Histoire » / Juillet 2015.
 
Patrice Quiot
 
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